SUIVI DES INVESTISSEMENTS DU FONDS MONDIAL DANS LES PROGRAMMES RELATIFS AUX DROITS HUMAINS
Author:
Gemma Oberth
Article Type:Article Number: 6
RĆSUMĆ Le financement des programmes relatifs aux droits humains reste un dĆ©fi majeur pour le Fonds mondial, particuliĆØrement pour les programmes relatifs Ć la tuberculose et au paludisme. Cet article explique oĆ¹ et comment le Fonds investit en matiĆØre de droits humains.
Dans un commentaire publiĆ© rĆ©cemment dans la version anglaise de lāOFM, Ralf JĆ¼rgens, coordonnateur principal des droits humains du Fonds mondial, a attirĆ© lāattention sur la nĆ©cessitĆ© d’accroĆ®tre l’investissement du Fonds mondial dans les programmes qui rĆ©duisent les obstacles liĆ©s aux droits humains empĆŖchant lāaccĆØs aux services relatifs au VIH, Ć la tuberculose et au paludisme. M. JĆ¼rgens a indiquĆ© que moins de 1% de l’argent du Fonds mondial est consacrĆ© Ć ces programmes malgrĆ© un consensus international sur le fait que ce chiffre devrait ĆŖtre beaucoup plus Ć©levĆ©. Cet article dĆ©taille un peu plus prĆ©cisĆ©ment comment et oĆ¹ le Fonds mondial investit dans les programmes relatifs aux droits humains ; et explique que le Fonds est plus transparent quant Ć lāidentification des dĆ©ficits de financement et quant aux moyens dāy remĆ©dier.
Dans l’ensemble, le Fonds mondial investit 32,1 millions $ dans les programmes nationaux relatifs aux droits humains, avec un montant supplĆ©mentaire de 15 millions $ dĆ©pensĆ©s au niveau rĆ©gional.
Les activitĆ©s relatives aux droits humains sont gĆ©nĆ©ralement limitĆ©es au module relatif Ć la levĆ©e des barriĆØres juridiques de la note conceptuelle. Elles comprennent des approches telles que la rĆ©duction de la stigmatisation et de la discrimination ; la formation ou la sensibilisation des travailleurs de la santĆ© ou des agents d’application de la loi; sensibilisation aux droits et prestations juridiques ; et la conduite de plaidoyers politique et juridique. Le tableau 1 prĆ©sente une ventilation des activitĆ©s relatives aux droits humains dans lesquelles le Fonds mondial investit actuellement.
Tableau 1: Investissements actuels du Fonds mondial en matiĆØre de droits humains, par domaine de programme
Programme relatifs aux droits humains | Investissement actuel du Fonds mondial ($ US) |
Evaluation et rĆ©forme de l’environnement juridique | 4.0 m |
Services juridiques et sensibilisation aux droits | 4.9 m |
Formations aux droits humains | 4.9 m |
Surveillance communautaire des droits humains | 2.9 m |
Politique de plaidoyer | 4.2 m |
Autres interventions droits humains (y compris la rƩduction de la stigmatisation et de la discrimination; et la violence fondƩe sur le sexe ) | 11,2 m |
Parmi les exemples spĆ©cifiques, on peut citer les activitĆ©s financĆ©es dans le cadre de la subvention VIH au Soudan du Sud, oĆ¹ le Fonds mondial soutient l’accĆØs Ć des programmes de justice, y compris les services juridiques. Au Tadjikistan, dans le cadre de la subvention relative Ć la tuberculose, le Fonds mondial investit dans le plaidoyer pour les droits Ć la santĆ© et la protection sociale.
Proportionnellement, lāinvestissement du Fonds mondial dans les programmes relatifs aux droits humains est plus important dans certaines rĆ©gions que d’autres (tableau 2). En AmĆ©rique latine et dans les CaraĆÆbes, le financement de ces programmes reprĆ©sente environ 2,3% du financement indicatif demandĆ©. En Europe orientale et en Asie centrale, il est d’environ 1%. En revanche, en Afrique sub-saharienne, le financement de ces programmes constitue seulement 0,26% du total des investissements du Fonds mondial. Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, la proportion est d’environ 0,33%. L’approche accĆ©lĆ©rĆ©e de l’ONUSIDA prĆ©voit des investissements dans des programmes visant Ć rĆ©duire les obstacles liĆ©s aux droits humains dans l’accĆØs aux services et d’autres moyens sociaux pour atteindre 8% du financement total du programme pour le VIH en 2020. De telles analyses basĆ©es sur le besoin de ressources n’existent pas (encore) pour la tuberculose et le paludisme.
Tableau 2: Investissements actuels du Fonds mondial en matiĆØre de droits humains, par rĆ©gion
RƩgion | Tous les fonds indicatif demandƩ ($ US) | Investissement dans les droits de humains ($ US) | Investissement dans les droits humains (proportionnel) |
AmĆ©rique latine et CaraĆÆbes | 277 m | 6,3 m | 2,27% |
Europe de l’Est et Asie centrale | 414 m | 4,3 m | 1,04% |
Asie-Pacifique | 1,7 b | 5,1 m | 0,30% |
Moyen-Orient et Afrique du Nord | 550 m | 1,8 m | 0,33% |
Afrique subsaharienne | Ā Ā 5,5 b | 14,2 m | 0,26 % |
Selon Tinashe Mundawarara, de lāorganisation Zimbabwe Lawyers for Human Rights, il y a moins d’apprĆ©ciation de la nĆ©cessitĆ© de cultiver des rĆ©ponses fondĆ©es sur les droits humains en Afrique australe et, par consĆ©quent, les gouvernements sont moins enclins Ć les inclure dans les propositions. Ā«Ā La composition des Ć©quipes d’Ć©criture pour des notes conceptuelles n’a pas inclus des experts en droits humains, et les mĆ©canismes de dialogue avec les pays n’ont pas fait appel Ć des consultants en droits humainsĀ Ā», a expliquĆ© M. Mundawarara. Ā«Ā En consĆ©quence, il y a une concentration de l’expertise mĆ©dicale et autres dans les comitĆ©s d’Ć©critureĀ Ā». En outre, de nombreuses ICN en Afrique sub-saharienne sont obligĆ©es de choisir entre des prioritĆ©s concurrentes, y compris les soins et le traitement, ce qui peut aider Ć expliquer pourquoi les programmes droits humains sont souvent Ć©vincĆ©es.Une des raisons du sous-financement des programmes relatifs aux droits humains est qu’ils sont souvent mis en Åuvre sur une trĆØs petite Ć©chelle et, par consĆ©quent, ne sont pas contrĆ“lĆ©s et Ć©valuĆ©s sĆ©parĆ©ment. Une autre raison tient aussi au fait que les programmes relatifs aux droits humains pour la tuberculose et le paludisme n’ont pas Ć©tĆ© suffisamment dĆ©finis et chiffrĆ©s, comme ils l’ont Ć©tĆ© pour le VIH. Cependant, la principale raison pour laquelle les programmes relatifs aux droits humains reƧoivent moins d’argent du Fonds mondial qu’ils le devraient (selon la modĆ©lisation accĆ©lĆ©rĆ©e de l’ONUSIDA) est plus simple: Les pays ne font tout simplement pas de demande de financement pour ces interventions.
Sur les 119 notes conceptuelles prĆ©sentĆ©es au Fonds mondial dans Windows 1 Ć 5, 72 % ont indiquĆ© que les obstacles liĆ©s aux droits humains Ć l’accĆØs, seulement 10 % ont effectivement demandĆ© des fonds pour le module relatif Ć la suppression des barriĆØres juridiques (voir l’articleĀ publiĆ© dans lāOFM). De nouvelles informations provenant du Fonds mondial rĆ©vĆØle qu’il y a une forte Ā« cascade du financement des droits humains Ā» (Figure 1).
Figure 1: Le Fonds mondial de financement des droits humains en cascade – De la narration Ć l’investissement
La figure 1 montre clairement que la cascade est beaucoup plus forte pour les demandes de subventions relatives Ć la tuberculose et au paludisme que pour celles relatives au VIH ou Ć la tuberculose / VIH Ā intĆ©grĆ©s. Par exemple, bien que 35 pays aient soumis des notes conceptuelles relatives Ć la TB contenant une analyse droits humains, seulement six ont des programmes de dĆ©fense des droits humains avec un budget traƧable dans leurs subventions signĆ©es. Pour le paludisme, bien que 30 notes conceptuelles contiennent une analyse des obstacles liĆ©s aux droits humains, aucune subvention nāa une ligne budgĆ©taire pour y remĆ©dier.
On ne sait pas comment l’initiative du Fonds mondial de prioriser les 15-20 pays sur la base de lāintensitĆ© des efforts envers les droits humains permettra de rĆ©duire les dĆ©sĆ©quilibres dans le financement dĆ©diĆ© aux droits humains parmi les trois maladies. Les programmes soutenus dans le cadre de l’initiative seront conƧus autour des septĀ interventions clĆ©sĀ pour rĆ©duire la stigmatisation et la discrimination et renforcer l’accĆØs Ć la justice identifiĆ©s par l’ONUSIDA, ce qui suggĆØre que ces programmes seront largement ciblĆ©s VIH. Selon le Fonds mondial, plus de travail sera fait au second semestre 2016 pour clarifier la faƧon dont une importance accrue peut ĆŖtre donnĆ©e aux droits humains dans les programmes relatifs Ć la tuberculose dans le cadre de l’initiative, et il y aura une deuxiĆØme phase en 2017 pour faire de mĆŖme pour le paludisme.
En ce qui concerne la faƧon dont les pays seront sĆ©lectionnĆ©s pour leurs efforts intensifs sur les droits humains, le Fonds mondial utilise plusieurs critĆØres, comme suit:
- la reprƩsentation de toutes les rƩgions du Fonds mondial ;
- au moins cinq pays sont des pays Ć fort impact ;
- au moins deux pays ont des environnements d’exploitation difficiles ;
- au moins un pays est Ć 5-10 ans dāune transition;
- au moins cinq pays ont des ƩpidƩmies concentrƩes parmi les populations vulnƩrables ou clƩs ;
- au moins trois pays font Ć©galement partie de lāinitiative du Fonds mondial Actions stratĆ©giques pour l’Ć©galitĆ© de genre (SAGE) ou sont des pays prioritaires pourĀ DREAMSĀ (en anglais), l’investissement du PEPFAR.
(SAGE est le programme permettant de suivre opĆ©rationnalisation de lāengagement du Fonds mondial envers l’Ć©galitĆ© des sexes dans sa nouvelle stratĆ©gie, en veillant Ć ce que l’objectif stratĆ©gique visant Ć promouvoir et protĆ©ger les droits humains et l’Ć©galitĆ© des sexes se traduise par des investissements stratĆ©giques percutants et des programmes de qualitĆ© pour les femmes et les filles).
Le Fonds mondial a l’intention de suivre les efforts intensifs relatifs aux droits humains par le biais d’un nouvel indicateur clĆ© de performance (ICP). Cet indicateur permet de suivre les progrĆØs dans l’Ć©tablissement de programmes qui rĆ©duisent les obstacles liĆ©s aux droits humains dans lāaccĆØs aux services en se concentrant sur les 15-20 pays prioritaires. En prĆ©vision de la transition, lāICP surveillera spĆ©cifiquement lāaugmentation des programmes visant Ć rĆ©duire les obstacles aux droits humains pour les populations clĆ©s et vulnĆ©rables dans les pays Ć revenu intermĆ©diaire, en particulier la mesure dans laquelle les gouvernements soutiendront et prendront en charge ces programmes.
En plus du nouvel ICP, les dĆ©fenseurs des droits humains au niveau national conseillent de se concentrer sur le renforcement de lāexpertise et l’engagement local. Ā«Ā Il est nĆ©cessaire de renforcer les capacitĆ©s des circonscriptions des ICN [Instance de coordination nationale] en matiĆØre de droits humains, de sorte qu’elles puissent commencer Ć avoir des grilles dāanalyse droits humains et de faire Ć©voluer les interventions fondĆ©es sur les droitsĀ Ā», a dĆ©clarĆ© Mundawarara. Ā«Ā A ce moment lĆ seulement, ces questions pourront ĆŖtre incluses dans les futures notes conceptuelles. Ā»
Les informations contenues dans cet article proviennent d’une prĆ©sentation faite par le Fonds mondial Ć la demande dāun partenaire, organisĆ©e le 7 juillet 2016 par le DĆ©partement CommunautĆ©, Droits et Genre du SecrĆ©tariat du Fonds mondial. Une copie de la prĆ©sentation est disponible auprĆØs de l’auteure sur demande (gemma.oberth@gmail.com).