QUI EST LE NOUVEAU VENU DANS L’ÉCOLOGIE DE LA SANTÉ MONDIALE?
Author:
Aidspan
Article Type:Article Number: 5
Le Fonds d’intermédiation financière de la Banque mondiale pour la PPR tient sa première réunion du Conseil d'administration
RÉSUMÉ Le Fonds d’intermédiation financière pour la préparation et la riposte aux pandémies a tenu sa première réunion de Conseil d'administration du 8 au 9 septembre 2022. Alors que s’est récemment achevée la septième Conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial à New York, il ait apparu opportun de déterminer dans quelle mesure la création de cet autre instrument financier a eu (ou non) un impact sur la diminution des contributions au Fonds mondial.
Suite à l’impact mondial dévastateur de la COVID-19, la préparation et la riposte aux pandémies (PPR) constituent désormais une priorité mondiale absolue. Parmi les bailleurs de fonds internationaux dans le domaine de la santé, le Fonds mondial a été le plus prompt à réagir à la pandémie en créant une nouvelle modalité de subvention flexible, notamment, le mécanisme de riposte à la COVID-19 (C19RM). Fort de son expérience en matière de lutte contre les pandémies mondiales acquise au cours de ses 20 années de soutien aux ripostes nationales au VIH, à la tuberculose et au paludisme, le Fonds mondial était bien placé et expérimenté pour soutenir les programmes de lutte contre les maladies transmissibles prioritaires des pays en développement, et il a pu mettre à profit cette expérience lors de la riposte à la nouvelle pandémie. Il a même été en mesure de faire preuve de flexibilité en reprogrammant les subventions existantes pour les trois maladies pour faire face à la COVID-19.
L’OMS préconise une riposte mondiale plus énergique aux pandémies
Et si cette pandémie n’était que la partie émergée de l’iceberg et présageait l’avènement de nouvelles pandémies encore plus dévastatrices? Le monde a été ébranlé par les ravages causés par la COVID et la communauté internationale a clairement perçu la nécessité de redoubler d’efforts au niveau mondial pour se préparer à faire face aux menaces existantes et potentielles que représentent les pandémies inconnues jusqu’alors ou émergentes. Fin 2020, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a donc créé le Conseil sur l’économie de la santé pour tous afin de repenser la manière dont la valeur de la santé et du bien-être est mesurée, produite et distribuée au sein de l’économie.
L’objectif déclaré du Conseil est de « recadrer la santé pour tous comme un objectif de politique publique et de veiller à la structuration des économies et des finances nationales et mondiales de manière à pouvoir atteindre cet objectif ambitieux ». Ce Conseil a pour but de créer un corpus de travail qui envisage l’investissement dans les systèmes de santé locaux et mondiaux comme un investissement dans l’avenir, et non comme un coût à court terme.
En réponse, le G20 a mis en place un groupe de travail conjoint Finance-Santé sur la PPR.
Le G20 ou Groupe des Vingt est un forum intergouvernemental comprenant 19 pays et l’Union européenne (UE). Son mandat couvre les grandes questions liées à l’économie mondiale, telles que la stabilité financière internationale, l’atténuation du changement climatique et le développement durable.
Le 31 octobre 2021, un communiqué du G20 a pris acte de la création du groupe de travail conjoint Finances-Santé dans le but de « renforcer le dialogue et la coopération mondiale sur les questions relatives à la PPR, de promouvoir l’échange d’expériences et de bonnes pratiques, d’élaborer des dispositifs de coordination entre les ministères des finances et de la santé, de promouvoir une action collective, d’évaluer et de traiter les urgences sanitaires ayant un impact transfrontalier, et d’encourager une gestion efficace des ressources consacrées à la PPR, tout en adoptant une approche “Une seule santé” ». Dans ce contexte, le groupe de travail a été chargé d’étudier et de rendre compte, d’ici le début de l’année 2022, des modalités de mise en place d’un mécanisme financier conçu de manière inclusive, et dans lequel l’OMS jouera un rôle central de coordination. Ce mécanisme devait être piloté par le G20 et impliquer dès le départ les pays à revenu faible et intermédiaire (PRF/PRI), d’autres partenaires non-membres du G20 et les banques multilatérales de développement, afin de garantir un financement adéquat et durable de la prévention, de la préparation et de la riposte aux pandémies.
En avril 2022, sous les auspices de l’OMS, le groupe de travail a produit une série de recommandations, intitulée Concrétiser l’engagement des dirigeants du G20 de créer un Fonds d’intermédiation financière (FIF) équitable et efficace pour la prévention, la préparation et la riposte aux pandémies (PPR).
Et, sur la base de ces dernières, avec un vaste soutien des membres du G20, le Conseil d’administration de la Banque mondiale a approuvé la création d’un Fonds d’intermédiation financière (FIF) pour la prévention, la préparation et la riposte aux pandémies (PPR) le 30 juin 2022. Le FIF PPR a été officiellement institué par son Conseil d’administration lors de sa réunion inaugurale qui s’est tenue du 8 au 9 septembre 2022.
Qu’est-ce qu’un FIF?
Pour nombre d’entre nous, c’est la première fois que nous entendions parler d’un FIF. Cependant, ils existaient bien avant la création de celui de la PPR.
Les Fonds d’intermédiation financière (FIF) sont un mécanisme de financement de la Banque mondiale. Il s’agit de dispositifs financiers qui mobilisent généralement diverses ressources publiques et privées pour soutenir des initiatives internationales, permettant ainsi à la communauté internationale d’apporter une réponse directe et coordonnée aux priorités mondiales. La majorité des FIF ont appuyé des programmes mondiaux souvent axés sur la fourniture de biens publics mondiaux, la prévention des maladies transmissibles, les réponses aux changements climatiques et la sécurité alimentaire. Selon la Banque mondiale, les FIF comprennent souvent des dispositifs de financement et de gouvernance innovants, ainsi que des conceptions flexibles qui permettent de lever des fonds auprès de sources multiples, tant souveraines que privées. Les fonds peuvent être acheminés de manière coordonnée vers un éventail de bénéficiaires des secteurs public et privé par le biais d’une variété de mécanismes. Les structures du FIF sont personnalisées en fonction des besoins du partenariat et des accords avec la Banque mondiale.
Que fera ce FIF spécifique?
La Banque mondiale sera l’administrateur du FIF et accueillera le Secrétariat qui comportera du personnel technique détaché de l’OMS. Le Conseil d’administration constituera un groupe consultatif technique, présidé par l’OMS et composé d’experts de premier plan, chargé de l’évaluation et de la formulation de recommandations au conseil d’administration sur les qualités techniques des propositions de financement, en veillant à établir des liens avec le Règlement sanitaire international, dans le cadre de l’architecture mondiale plus large de la PPR.
Après sa réunion inaugurale selon le Communiqué de presse de la Banque mondiale, le FIF PPR fournira un flux dédié de financement supplémentaire à long terme pour renforcer les capacités en matière de PPR dans les pays à revenu faible et intermédiaire les pays à revenu faible et intermédiaires et combler les lacunes majeures par des investissements et un appui technique aux niveaux national, régional et mondial. Le FIF s’appuiera sur les forces et les avantages comparatifs des principales institutions engagées dans la PPR, fournira un soutien complémentaire, améliorera la coordination entre les partenaires, incitera les pays à accroître leurs investissements, servira de plateforme pour le plaidoyer et contribuera à focaliser et à maintenir une attention de haut niveau indispensable au renforcement des systèmes de santé.
Les premiers appels à propositions pour les investissements qui seront financés par le FIF seront ouverts en novembre 2022.
Comment le FIF complétera-t-il ou reproduira-t-il la riposte PPR du Fonds mondial?
En juin, l’OFM a publié un article spéculant sur la question de savoir si le nouveau FIF du PPR reproduirait le Fonds mondial, en mettant en évidence les similitudes et les différences et en se posant la question de savoir si l’existence d’un nouveau mécanisme de financement mondial aura un impact négatif sur les efforts de la septième reconstitution. (Le Fonds d’intermédiation financière: Un nouveau modèle qui fait double emploi avec le Fonds mondial).
En termes de chevauchement des activités, le financement du FIF peut être sollicité pour aider au renforcement et au maintien des capacités en matière de PPR dans des domaines tels que la surveillance des zoonoses, les laboratoires, la communication, la coordination et la gestion des urgences, les capacités essentielles en termes de personnel de santé et l’engagement communautaire. Les projets financés par le FIF peuvent également contribuer à renforcer la PPR aux niveaux régional et mondial, par exemple, en développant les capacités relatives aux contre-mesures médicales. Le FIF peut soutenir l’apprentissage entre pairs, fournir une assistance technique ciblée et contribuer au suivi systématique des capacités de PPR. Il existe donc un certain potentiel de chevauchement, et nous pouvons d’ores et déjà constater qu’il sera nécessaire d’identifier les synergies entre les différents flux de financement au niveau national en vue d’assurer la complémentarité et d’éviter la duplication des activités.
À ce jour, plus de 1,4 milliard de dollars d’engagements financiers en faveur du FIF ont déjà été annoncés et d’autres sont attendus dans les mois à venir. Pour l’instant, des engagements ont été pris par l’Afrique du Sud, l’Australie, le Canada, la Chine, la Commission européenne, la France, l’Allemagne, l’Inde, l’Indonésie, l’Italie, le Japon, la République de Corée, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, Singapour, l’Espagne, les Émirats arabes unis, le Royaume-Uni, les États-Unis, la Fondation Bill et Melinda Gates, la Fondation Rockefeller et le Wellcome Trust. La majorité d’entre eux sont également des contributeurs du Fonds mondial. Naturellement, nous ne savons pas quel montant supplémentaire la reconstitution des ressources du Fonds mondial aurait pu recevoir sans l’existence du FIF PPR et nous ne le saurons peut-être jamais. Mais avec la diminution de l’aide publique au développement (APD) due à la récession économique mondiale, il est raisonnable de supposer qu’il y a eu un certain impact négatif en termes de financement disponible pour d’autres priorités.
Qu’en est-il de la gouvernance du FIF?
Le nouveau FIF PPR est supervisé par un Conseil d’administration, qui établira le programme de travail général et prendra les décisions en matière de financement. Le conseil d’administration du FIF comprend une représentation égale des bailleurs de fonds souverains et des gouvernements des pays de mise en œuvre potentiels (co-investisseurs), ainsi que des représentants de fondations et d’organisations de la société civile (OSC). La Banque mondiale déclare qu’avec l’OMS, elle intensifiera son travail avec le Conseil d’administration, en consultation avec les OSC et d’autres parties prenantes, pour aider à rendre le FIF opérationnel et à élaborer le cadre de résultats et les priorités du FIF à l’approche du premier appel à propositions.
La Structure de gouvernance est décrite sur le site Web et nous pouvons constater que, contrairement au Fonds mondial, les partenaires de mise en œuvre (appelés entités de mise en œuvre) ont déjà été présélectionnés. Il s’agit de la Banque africaine de développement, de la Banque asiatique de développement, de la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures, de la Banque européenne d’investissement, de l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture, de la Banque interaméricaine de développement, de la Société financière internationale, de l’UNICEF, de la Banque mondiale et de l’OMS. Gavi, l’Alliance pour les vaccins, le Fonds mondial et la Coalition for Epidemic Preparedness Innovations (CEPI) sont également considérés comme des entités de mise en oeuvre. Cela implique que le Fonds mondial lui-même pourrait donc être éligible pour bénéficier d’une subvention qui pourrait ensuite être transmise aux activités de PPR des pays, le cas échéant, en utilisant probablement les mécanismes de financement existants du Fonds mondial.
Lorsque de fortes sommes d’argent et de grandes influences sont en jeu, l’équilibre des pouvoirs devient un facteur important. Le Fonds mondial dispose déjà d’un certain nombre de freins et de contrepoids dans son travail grâce aux contributions des différentes délégations et à leur présence rotative au sein des comités et du CA, ainsi que du Bureau de la circonscription africaine et du Global Fund Advocates Network. Sans compter le rôle d’Aidspan en tant qu’unique observateur mondial indépendant et objectif des réunions du Conseil d’administration du Fonds mondial, qui nous permet de publier des points de vue indépendants et impartiaux sur le travail du Fonds mondial. Nous espérons que la transparence figurera parmi les principales priorités du FIF PPR.