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Instabilité politique, ressources en déclin et recrudescence de l’épidémie de paludisme contribuent à un contexte difficile pour les subventions du Fonds mondial au Burundi
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Instabilité politique, ressources en déclin et recrudescence de l’épidémie de paludisme contribuent à un contexte difficile pour les subventions du Fonds mondial au Burundi

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L’incidence du paludisme a doublé entre 2014 et 2016

RÉSUMÉ L’instabilité politique et les problèmes économiques persistants ont créé un contexte complexe pour la programmation au Burundi. Les subventions de lutte contre le paludisme et de lutte conjointe contre la tuberculose et le VIH récemment approuvées par le Conseil d’administration du Fonds mondial se heurtent à de nombreuses difficultés. Cet article résume les commentaires du Comité technique d’examen des propositions et du Comité d’approbation des subventions suite à leur examen des demandes de financement du Burundi.

L’instabilité politique récente, combinée aux problèmes économiques persistants, a créé un contexte complexe pour la programmation au Burundi. Ce pays est l’un des cinq pays les plus pauvres au monde, et dépend fortement de l’aide extérieure pour financer son secteur sanitaire. Une tentative de coup d’État en mai 2015 a engendré une crise politique. La suspension de l’aide par les principaux donateurs suite à la crise a entraîné un déclin de 87 % des ressources extérieures, ce qui, à son tour, a mené à une diminution de 54 % du budget de la santé 2016. Heureusement, le budget sanitaire du Burundi pour 2017 envisage une restauration significative du soutien des donateurs.

D’après le Secrétariat, la marge budgétaire limitée en matière de dépenses nationales, la forte dépendance au financement volatil des donateurs, les faiblesses en matière de gestion des finances publiques, les inefficacités au niveau des dépenses sanitaires, la protection sous-optimale offerte par la sécurité sociale, l’inadéquation de l’infrastructure et des ressources humaines face aux besoins sanitaires urgents au niveau communautaire sont autant d’obstacles majeurs pour la pérennité à long terme des programmes soutenus par le Fonds mondial.

Dans le cadre de ce contexte d’intervention difficile, le Fonds mondial opère sous le couvert de la politique de sauvegarde supplémentaire. Le 13 décembre dernier, le Conseil d’administration du Fonds mondial a approuvé pour le Burundi une subvention de lutte contre le paludisme (36,7 millions de dollars) et une subvention de lutte conjointe contre la tuberculose et le VIH (35,6 millions de dollars). Dans cet article, nous rapportons les commentaires du Comité technique d’examen des propositions (CTEP) et du Comité d’approbation des subventions (CAS) sur les demandes de financement présentées par l’instance de coordination nationale (ICN) du Burundi, en particulier en ce qui concerne la demande relative au paludisme.

PALUDISME

Le programme envisagé dans la demande de financement comporte une campagne de distribution à grande échelle de moustiquaires imprégnées d’insecticide de longue durée (MIILD) en 2019, des activités de prise en charge des cas, la prise en charge intégrée des cas au niveau communautaire (PEC-C), la poursuite de l’intensification du traitement préventif intermittent pendant la grossesse et l’utilisation d’artésunate injectable pour traiter les cas de paludisme graves.

Le Burundi est depuis novembre 2015 touché par une épidémie de paludisme qui a entraîné un doublement du nombre de cas. Le but du plan stratégique national (PSN) 2013-2017 du Burundi est de réduire la morbidité et la mortalité liées au paludisme de 75 %. Selon le CTEP, alors que le programme national anticipait une réduction de 75 % de l’incidence de 2014 à 2017, celle-ci a doublé entre 2014 et 2016. « Le Burundi doit à présent s’attacher à inverser la tendance », a commenté le Comité.

Lors de son examen de la demande du Burundi, le CTEP a indiqué que le pays n’était pas en bonne voie pour obtenir les résultats et l’impact attendus pour sa subvention en cours. « Face à la situation épidémique pressante, il est nécessaire d’accroître le degré d’urgence et d’intensification des interventions. Le programme n’agit pas avec suffisamment de rapidité, en partie en raison des problèmes politiques et financiers complexes et [du] retard de signature des subventions », a déclaré le Comité.

Le CTEP a observé que la dernière distribution à grande échelle de MIILD remonte à 2014. La demande de financement précise que les MIILD sont distribuées tous les trois ans aux populations vulnérables, notamment aux établissements d’enseignement, aux camps militaires et d’unités de police ainsi qu’aux camps de réfugiés et de déplacés internes. Toutefois, ajoutait le Comité, en raison du manque d’information, il n’est pas clair si ces distributions ont bien lieu. Le CTEP a par ailleurs fait remarquer que la demande de financement ne mentionne pas de distributions de routine de MIILD entre les campagnes de distribution à grande échelle.

Néanmoins, le Comité technique d’examen des propositions considère que la demande de financement est bien conçue et tient compte de ses commentaires antérieurs. « La stratégie de lutte contre le paludisme du Burundi est appropriée, mais au vu des troubles politiques et de l’aggravation actuelle de l’épidémie, les interventions doivent être mises en œuvre de manière plus rapide et urgente. »

Points forts de la demande de financement

Selon le Comité technique d’examen des propositions, la demande de financement est techniquement solide et centrée stratégiquement car elle repose sur le plan stratégique national. Il estime les interventions proposées « pertinentes et appropriées à la situation actuelle ».

Le Comité a signalé qu’une analyse des obstacles entravant l’accès aux services pour les populations clés a été réalisée, laquelle a permis de mettre au point des démarches programmatiques spécifiques, qui ont partiellement été mises en œuvre. Face au contexte actuel d’agitation politique, il sera nécessaire de mener des efforts soutenus pour atteindre ces populations, a indiqué le Comité.

Problèmes et préoccupations

Le Comité technique d’examen des propositions signale trois préoccupations principales :

  • la lenteur des activités d’intensification ;
  • l’attention insuffisante accordée aux populations vulnérables ; et
  • le manque de compréhension des causes de la recrudescence de l’épidémie.

Examinons à présent chacun de ces problèmes.

Intensification

D’après le CTEP, le programme de lutte contre le paludisme s’est montré lent à mettre en œuvre les interventions financées précédemment, malgré l’incidence en hausse constante du paludisme, tendance apparente en 2014, selon lui.

« Il faut une démarche plus pressante, persistante et créative de déploiement et d’intensification des activités financées », a-t-il commenté. « Il est crucial d’assurer la disponibilité des traitements à tous les établissements de santé et d’améliorer la distribution des interventions préventives ». Le Comité estime également nécessaire d’élargir rapidement les interventions de pulvérisation intradomiciliaire d’insecticide à effet rémanent (PID) et de mettre en place des filières accélérées pour la distribution régulière de MIILD.

Le CTEP a demandé que, vers la fin de la première année de mise en œuvre de la subvention, l’instance de coordination nationale procède à un examen à mi-parcours du programme afin d’évaluer si l’épidémie est maîtrisée et de prévoir des mesures d’atténuation en cas de situation similaire à l’avenir.

Résultat : Durant l’établissement de la subvention, l’équipe de pays s’est informée sur le plan de riposte auprès du programme national de lutte contre le paludisme pour s’assurer que les activités sont mises en œuvre de manière efficace et opportune. D’après les documents de subvention, elle suit les activités de près et travaille avec les partenaires et le gouvernement pour remédier aux goulots d’étranglement limitant la rapidité de mise en œuvre, ainsi que pour assurer le suivi des marchandises afin d’éviter les ruptures de stocks.

Populations vulnérables

Le Comité technique d’examen des propositions a fait remarquer que les troubles politiques font augmenter le nombre de réfugiés, de déplacés internes et de populations mobiles et migrantes, ainsi que de certaines populations sur chantier. Or, selon lui, il ne ressort pas clairement de la demande de financement si leurs besoins sont satisfaits.

Le Comité recommande l’élaboration de démarches et de stratégies innovantes pour atteindre ces populations, notamment au moyen de cliniques mobiles et de distributions régulières de moustiquaires imprégnées d’insecticide de longue durée. Il recommande que les partenaires techniques consultent les pays voisins, en particulier le Rwanda et la Tanzanie, adjacents aux districts où l’incidence est la plus élevée, pour discuter de la situation actuelle du Burundi en termes de paludisme, vu que ces pays sont touchés de façon semblable par l’épidémiologie prévalant actuellement dans la région. Le CTEP recommande par ailleurs que le Secrétariat s’assure qu’un plan d’urgence est en place en vue de protéger les populations vulnérables au cas où la riposte prévue se verrait retardée.

Résultat : Les documents de la subvention indiquent que ce problème a été réglé durant l’établissement de la subvention, mais ils ne précisent pas comment.

Causes de la recrudescence de l’épidémie

Selon le Comité technique d’examen des propositions, les facteurs qui ont mené à l’augmentation des cas de paludisme ne sont pas connus, mais ils pourraient comprendre l’application insuffisante des stratégies de prévention et de lutte contre la maladie, la résistance aux insecticides, le manque d’accès aux traitements, l’inefficacité des traitements, la vulnérabilité due à l’insécurité alimentaire, les mouvements de population et des considérations d’ordre environnemental et climatique. Le Comité estime nécessaire de chercher les causes de l’épidémie, mais sans que cela retarde une riposte rapide.

Le CTEP recommande que l’ICN présente le plus vite possible une demande de financement hiérarchisée au-delà de la somme allouée (voir plus loin). Les fonds ainsi octroyés pourraient servir à mettre en œuvre une riposte meilleure et plus intense face à l’épidémie, et une partie des fonds pourrait être consacrée à une analyse de la situation post-épidémique. Le Comité recommande de réaliser une évaluation rigoureuse durant l’établissement de la subvention afin de comprendre les facteurs déterminants de l’épidémie.

Résultat : Cette problématique a été longuement débattue durant l’établissement de la subvention, et il a été conclu que les causes exactes de la recrudescence du paludisme au Burundi sont multiples et ne sont pas toutes connues. Les facteurs déterminants potentiels ont été identifiés avec le soutien de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Parmi ces facteurs figurent un manque de mesures de prévention (non disponibilité et faible usage des MIILD dans les ménages) et des facteurs environnementaux, comme l’extension des rizières et le changement climatique. Une enquête sur l’efficacité thérapeutique qui a débuté en septembre 2017 fournira des informations supplémentaires. Une analyse de situation post-épidémique sera en outre réalisée en 2018 avec le soutien de l’OMS, laquelle collectera des données additionnelles sur les causes de l’épidémie, évaluera le niveau de mise en œuvre du plan de riposte et formulera des recommandations appropriées.

Demande de financement hiérarchisée au-delà de la somme allouée

L’instance de coordination nationale a présenté une demande de financement hiérarchisée au-delà de la somme allouée, qui comprend a) la pulvérisation intradomiciliaire d’insecticide à effet rémanent dans les districts prioritaires, b) l’utilisation de MIILD pour combler les lacunes d’ici à la campagne de distribution à grande échelle de 2019, c) le renforcement du système de surveillance au travers de la mise en place d’un système d’information géographique, associé au suivi hebdomadaire des cas de paludisme, et d) le renforcement de l’analyse des données pour permettre de prendre des décisions rapides face aux situations d’urgence et de comprendre les causes sous-jacentes de la recrudescence inhabituelle des cas de paludisme.

Autres problèmes

Le Comité d’approbation des subventions a également pris note du déficit potentiel pour parvenir à la couverture nationale en MIILD (approximativement 466 000 moustiquaires sur un total de 7,0 millions, ce qui représente 7 % des besoins aux fins de la campagne de distribution à grande échelle), ainsi que des 182 000 moustiquaires nécessaires pour les groupes spéciaux (par ex. internats, hôpitaux, prisons). Le Secrétariat a indiqué que ce déficit de MIILD, dont la valeur s’élève à environ 1,5 million de dollars, sera suivi de près et que les gains d’efficacité identifiés durant la mise en œuvre de la subvention seront réinvestis de manière à combler les lacunes.

Le CAS a mis en avant la nécessité de procéder à des pulvérisations intradomiciliaires d’insecticide à effet rémanent dans 11 districts admissibles, dont les quatre couverts par le Fonds mondial au titre de la période de mise en œuvre précédente. Il s’est dit inquiet des déficits de financement potentiels en matière de PID à partir de 2018, et souligne la contribution cruciale de la pulvérisation intradomiciliaire pour ramener le paludisme sous le seuil d’épidémie.

Cofinancement

Le gouvernement a engagé 16,8 millions de dollars, satisfaisant ainsi aux exigences de cofinancement. Cependant, a commenté le Comité d’approbation des subventions, les situations économique, budgétaire et politique compromettent de manière significative le respect de cet engagement.

MODALITÉS DE MISE EN ŒUVRE

Dans son rapport, le Comité d’approbation des subventions dit approuver le passage de récipiendaires principaux nationaux au PNUD, « étant donné les difficultés majeures de gouvernance rencontrées par le passé ». Le PNUD gèrera à la fois la subvention TB/VIH et la subvention paludisme. La décision de changer de récipiendaires principaux paraît émaner du Secrétariat plutôt que de l’instance de coordination nationale. D’après les informations d’Aidspan, il semblerait du reste qu’elle ait provoqué un certain désarroi parmi les parties prenantes au Burundi.

Le Comité d’approbation des subventions a également indiqué que le portefeuille sera ramené de cinq subventions à deux, les programmes nationaux faisant office de sous-récipiendaires, tout en fournissant des mécanismes efficaces permettant à l’avenir aux organisations de la société civile de prendre en charge la mise en œuvre d’activités.

De plus, la nouvelle structure de mise en œuvre permettra des réductions significatives des compléments de salaire – de 90 % pour le programme de lutte contre le paludisme et de 85 % pour le programme conjoint TB/VIH.

TB/VIH

Le Comité d’approbation des subventions a souligné le soutien et la collaboration critiques avec les partenaires multilatéraux et bilatéraux et la société civile dans le pays. Il a aussi évoqué la nécessité de maintenir l’engagement et l’assistance technique durant la mise en œuvre de la subvention, en particulier dans quatre domaines clés :

  • élaboration d’une stratégie nationale en matière de laboratoires, notamment concernant la mise en œuvre de l’intensification des tests de charge virale ;
  • amélioration de l’accès et de la couverture du dépistage virologique chez les nourrissons nés de mères séropositives ;
  • assurer la qualité des interventions pour les populations clés, notamment des liens entre les activités de prévention et les services de dépistage et de traitement du VIH ; et
  • plan global de gestion de la chaîne d’approvisionnement pour le pays, notamment en matière d’entreposage et de distribution jusqu’au dernier kilomètre.

Prenant note des graves contraintes budgétaires, le CAS a exprimé son inquiétude quant au risque de pénuries d’antirétroviraux si le pays venait à adopter la stratégie « dépister et traiter » dans toutes les provinces et si les contributions publiques au financement des antirétroviraux ne se concrétisent pas. La mise en œuvre de la stratégie de dépistage et traitement dans toutes les provinces pourrait entraîner un déficit de financement des antirétroviraux d’environ 3 millions de dollars. Selon le Comité, l’audit de la cohorte VIH, dont les résultats étaient attendus fin 2017, déterminera le nombre de personnes sous antirétroviraux et permettra de calculer avec une plus grande exactitude les déficits de financement.

Le Comité d’approbation des subventions a indiqué que le Secrétariat et les partenaires mènent des discussions stratégiques avec le gouvernement concernant des mesures et étapes concrètes visant à garantir la contribution du gouvernement aux achats d’antirétroviraux à compter de 2018. Il a en outre signalé que l’ICN prévoit de soumettre une demande de financement hiérarchisée au-delà de la somme allouée décrivant les besoins en antirétroviraux pour prendre en charge les nouveaux patients, qui pourraient être financés si des ressources additionnelles sont libérées.

SRPS

Le Comité technique d’examen des propositions a commenté « avec satisfaction » que les investissements dans la mise en place de systèmes résistants et pérennes pour la santé (SRPS) sont intégrés dans les trois composantes de maladie de manière synergique et cohérente.

La stratégie comprend des investissements dans les domaines suivants :

  • élargissement des services de soins primaires au moyen des agents de santé communautaires et d’un système d’orientation des patients ;
  • mise en œuvre d’un paquet minimum défini d’activités pour les centres de santé ; et
  • déploiement du logiciel d’information sanitaire du niveau des districts et des hôpitaux au niveau communautaire.

 

L’instance de coordination nationale a affecté 10 % du budget global aux activités SRPS.

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