ESPOIRS ET INQUIÉTUDES AUTOUR DE L’INTRODUCTION DU NOUVEAU MODÈLE DE FINANCEMENT EN CÔTE D’IVOIRE
Author:
Aurélie Fontaine
Article Type:Article Number: 6
RÉSUMÉ Calendrier serré, manque d’expertise locale et d’argent pour recruter des consultants externes : si les membres de l’Instance de coordination nationale de Côte d’Ivoire saluent l’introduction du nouveau modèle de financement, il leur reste quelques inquiétudes et des questions à éclaircir.
Fin février, les membres de l’instance de coordination nationale (ICN) de Côte d’Ivoire, une soixantaine de représentants du gouvernement, d’organisations non gouvernementales et de la société civile, ont reçu une première formation de quatre jours sur le nouveau modèle de financement (NMF) du Fonds mondial.
Une « urgence », selon Jean Kagubaré, de l’organisation américaine Management Sciences for Health (MSH), qui a organisé cet atelier à Abidjan, la capitale économique ivoirienne.
« Les propositions de financements doivent être bouclées en juin 2014 pour le programme paludisme, et en avril 2015 pour le programme VIH. Donc effectivement, pour le palu c’est urgent. Et nous voulions associer les autres programmes le plus tôt possible dans le processus », précise Jean Kabugaré.
Avant cette formation, seuls le chargé du programme national de lutte contre le paludisme et la présidente de l’ICN avaient reçu une formation complémentaire, en décembre 2013, au Kenya, organisée par Roll Back Malaria.
Pendant ces journées, les trois formateurs de MSH ont insisté sur la manière de réaliser la note conceptuelle du NMF, qui présente la demande de financement du pays, et sur le rôle majeur que doivent jouer tous les principaux acteurs dans l’identification des priorités nationales.
Manque d’assistance technique
Si les membres de l’ICN approuvent la mise en œuvre du nouveau modèle de financement, ce changement suscite aussi des inquiétudes. Et le manque d’expertise pour développer la note conceptuelle est ce qui revient systématiquement dans la bouche des participants à la formation.
« Ces méthodes sont trop exigeantes. Nous n’avons pas toutes les compétences nécessaires, il faudrait une équipe mieux rôdée », souligne un membre du programme national de lutte contre le sida, présent à la formation et qui a demandé l’anonymat.
Même constat pour Gisèle Takalea, la vice-présidente du COLTMR-CI (Collectif des organisations de lutte contre la tuberculose et les maladies respiratoires de Côte d’Ivoire). « La formation est allée trop vite, c’était trop détaillé. Je me demande si nous allons réussir à bien faire. Cela risque d’être un peu compliqué au début. Il faudrait une formation supplémentaire, avec des exercices de simulation ».
Un atelier rapide, ce dont convient l’organisation MSH, chargée de la formation. « L’ICN a déjà beaucoup trop de travail et on leur donne un appui limité. Un conseiller technique, subventionné par le PEPFAR (Plan américain d’urgence du président pour la lutte contre le sida), devrait être en permanence à l’ICN à partir d’avril mais il sera là pour appuyer toutes les activités, et pas seulement le NMF », indique Alison Collins, du MSH.
L’autre problème évoqué lors de cette formation est justement le manque d’argent pour pouvoir recruter des consultants externes, chargés de mettre en place le NMF.
« Il y a toute une bagatelle d’activités à mener qui nécessitent beaucoup de financements, comme la revue du plan stratégique national. Il faut de l’argent pour mener les enquêtes, pour organiser les réunions. Autre exemple : cette année, il y a une grosse distribution de moustiquaires dans le pays, donc ça va prendre du temps. Comment va-t-on gérer les activités du programme et la réalisation de la note conceptuelle ? Cela nécessite un appui technique extérieur », rapporte le docteur Gnamien Kouamé, secrétaire permanent de l’ICN.
Malgré les difficultés liées à la transition de l’ancien au nouveau modèle, les membres de l’ICN sont globalement satisfaits de ces transformations et de la formation qu’ils ont reçue.
« Dans le précédent modèle, nous avions beaucoup de difficultés par rapport au taux de décaissement très faible ou aux procédures administratives qui traînaient pendant des années. Maintenant, la représentante du Fonds mondial pour la Côte d’Ivoire est là régulièrement, elle nous apprend à utiliser les procédures. Reste à voir dans la durée et la pratique, si le NMF va effectivement pouvoir améliorer la situation », explique Marie Lattroh, conseillère technique au ministère ivoirien de l’Economie et des Finances et membre de l’ICN.
Autre nouveauté unanimement saluée : le fait qu’il n’y ait plus de dates butoirs pour soumettre les propositions.