Un audit des subventions du Fonds mondial au Mali révèle des progrès significatifs dans la gestion financière et la qualité des services
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Il subsiste cependant des problèmes avec des péremptions de médicaments, des ruptures de stock et des retards dans la chaîne d'approvisionnement
RÉSUMÉ Malgré leur mise en œuvre dans un contexte d'intervention difficile, les subventions du Fonds mondial ont aidé le Mali à réaliser des progrès significatifs face aux trois maladies, selon un audit mené par le Bureau de l'Inspecteur général. Il subsiste cependant des problèmes avec des péremptions de médicaments et des ruptures de stock, des retards dans la chaîne d'approvisionnement et des retards dans la fourniture (ou la non-fourniture) de tests et de traitements.
En dépit d’un contexte d’intervention difficile, le Mali a enregistré des progrès significatifs dans la lutte contre les trois maladies. La qualité des données et des services des programmes a été améliorée. Les systèmes et processus financiers fonctionnement généralement de façon efficace. Cependant, des problèmes subsistent avec des péremptions de médicaments et des ruptures de stock, des retards dans la chaîne d’approvisionnement, des incohérences des données, un non-respect des directives de traitement et des retards dans la fourniture (ou la non-fourniture) de tests ou de traitements.
Ce sont là les principales conclusions d’un audit des subventions du Fonds mondial au Mali mené par le Bureau de l’Inspecteur général (BIG). Un rapport sur l’audit, qui couvre la période de janvier 2016 à juin 2017, a été publié le 20 novembre.
Le Mali, pays à faible revenu qui abrite une population de 17,6 millions d’habitants, est l’un des 25 pays les plus pauvres du monde. En raison de guerres civiles qui sévissent dans les régions septentrionales, le Mali est considéré comme un contexte d’intervention difficile par le Fonds mondial et est assujetti à la politique de sauvegarde supplémentaire du Fonds.
On dénombre actuellement quatre subventions actives au Mali : une subvention VIH gérée par le PNUD, une deuxième subvention VIH gérée par Plan International, une subvention paludisme dont le récipiendaire principal est Populations Services International (PSI) et une subvention tuberculose, gérée par Catholic Relief Services. La moitié des budgets des subventions va à l’achat de médicaments.
Le tableau ci-après liste les trois domaines évalués dans le cadre de l’audit, ainsi que les notations du BIG et un résumé de ses commentaires pour chacun de ces domaines.
Réalisations et bonnes pratiques
Le Mali a réalisé de bons progrès dans la réduction des charges de morbidité, estime le BIG. Les décès dus au paludisme ont diminué de 20 pour 100 000 en 2010 à moins de 10 pour 100 000 en 2015. La couverture du traitement antirétroviral a augmenté de 40 % en 2014 à 58 % en 2016.
Les récipiendaires principaux mis en place pour les subventions VIH et tuberculose après l’identification d’irrégularités financières en 2010 sont généralement dotés de processus et de contrôles de gestion financière et d’achat efficaces, juge le BIG, notamment concernant les avances, les rapprochements bancaires, la séparation des tâches, les systèmes d’achat et de paiement automatisés et les approbations relatives aux révisions de prix. Les récipiendaires principaux documentent et archivent en outre les données financières de façon appropriée. (Note de la rédaction : ce domaine a été jugé « efficace » par le BIG ; nous ne nous rappelons pas à quand remonte la dernière fois qu’il a attribué cette notation.)
Tableau : Aperçu des constatations de l’audit des subventions du Mali
DOMAINE 1 : Efficacité des systèmes de contrôle interne et des mécanismes d’assurance de la chaîne d’approvisionnement pour fournir et rendre compte des médicaments. | Notation : Partiellement efficace |
Commentaires du BIG : Le déploiement de systèmes automatisés d’inventaire et d’information logistique ainsi que les directives d’approvisionnement et de distribution ont amélioré la chaîne d’approvisionnement en médicaments. Cependant, les ruptures de stock récurrentes et les inexactitudes de données continuent d’exister, contribuant aux commandes d’urgence et aux perturbations des tests / traitements. Les informations utiles générées par les systèmes automatisés doivent être analysées et utilisées efficacement pour anticiper les problèmes de la chaîne d’approvisionnement. | |
DOMAINE 2 : Efficacité de la supervision du programme et d’autres contrôles internes pour fournir des données de programme précises et des services appropriés aux patients. | Notation : Partiellement efficace |
Commentaires du BIG : Les mécanismes d’assurance et de supervision ont identifié avec succès les problèmes d’incohérences importantes dans les cahiers/ registres de données primaires, les rapports des centres de santé / centres de traitement et les statistiques nationales sur les maladies. Cependant, en raison du faible suivi des résultats de la surveillance, l’efficacité de la correction des faiblesses identifiées est limitée. L’absence de codification nationale des patients infectés par le VIH augmente le risque d’inexactitude des données. Des unités de traitement pour le paludisme et le VIH existent à tous les niveaux, tandis que des protocoles et des directives de traitement ont également été élaborés et largement diffusés. Cependant, des ruptures de stocks de médicaments essentiels ou des pannes d’équipement ont également entraîné des cas de non-respect des protocoles de traitement, des retards de traitement ou l’absence de traitement. | |
DOMAINE 3 : Conception de contrôles financiers et d’assurances pour identifier et traiter les problèmes financiers. | Notation : Efficace |
Commentaires du BIG : Depuis la modification des arrangements de mise en œuvre des subventions et l’introduction de sauvegardes supplémentaires après 2010, les processus de gestion financière et de passation des marchés pour les deux bénéficiaires de subventions sont généralement efficaces, avec des problèmes financiers opérationnels limités identifiés au cours de l’audit ou signalés par d’autres arrangements d’assurance. |
Le Bureau de l’Inspecteur général applique un système de notation à quatre niveaux : efficace, partiellement efficace, nécessite une nette amélioration et inefficace.
Des mesures sont en cours pour améliorer la chaîne d’approvisionnement et la qualité des données et des services, signale le BIG. De nouveaux systèmes d’information ont amélioré la qualité et la ponctualité des données provenant des établissements de santé et des régions, ce qui a entraîné certains progrès au niveau de la réduction des ruptures de stock, des péremptions de médicaments, des interruptions de traitement et du respect des directives de traitement. Il existe des capacités de stockage satisfaisantes, de bons dispositifs de nettoyage et des mécanismes de distribution bien équipés au sein de la chaîne d’approvisionnement, ajoute le BIG. Par ailleurs, les mécanismes d’assurance se sont généralement révélés efficaces pour identifier les problèmes relatifs aux données programmatiques et à la qualité des services.
Principaux problèmes et risques
L’audit a identifié des problèmes dans deux domaines principaux :
- des mesures de suivi et correctives efficaces sont nécessaires pour lutter contre les problèmes connus concernant la qualité des données et des services ; et
- de nouvelles améliorations sont nécessaires au niveau de la chaîne d’approvisionnement.
Faiblesses liées à la qualité des données et des services
D’importantes déficiences ont été recensées au niveau des données tout au long de la chaîne d’information, y compris dans les données au niveau national, les registres/enregistrements de santé primaire et les rapports mensuels des établissements de santé. Du fait de l’absence de suivi systématique, indique le BIG, l’efficacité des visites de supervision est limitée et ne permet pas de résoudre les problèmes identifiés relatifs aux données. L’absence a) d’assurance de la qualité des transmissions de données et b) de codification nationale des patients séropositifs au VIH contribue aussi aux problèmes de données.
Le BIG indique avoir observé des cas de traitement contre le paludisme sans dépistage approprié, de traitement contre le VIH sans numération des CD4 ou évaluation de la charge virale, et des cas d’incapacité à fournir un traitement car le dépistage n’a pas pu être effectué. Ces problèmes sont aggravés par des ruptures de stock de produits essentiels de santé et des pannes de matériel de dépistage, affirme le BIG.
Les auditeurs ont constaté des problèmes au niveau du dépistage et du traitement, tant pour le programme de lutte contre le paludisme que pour le programme de riposte au VIH. Par exemple, dans l’établissement de santé de la région de Waferma, 161 cas ont été traités avec une combinaison thérapeutique à base d’artémisinine sans que l’on ait procédé à un test de dépistage rapide ou à une microscopie en février-mars 2017. Dans un établissement de santé de la région de Kolebougou, à l’inverse, des patients souffrant de fièvres n’ont fait l’objet ni d’un dépistage ni d’un traitement.
S’agissant du VIH, des patients d’un hôpital principal administrant 5 % des traitements nationaux et d’autres centres de soins en dehors de Bamako n’ont pu bénéficier de tests de numération des CD4 et d’évaluation de la charge virale requis en vertu du protocole de traitement. En outre, des problèmes ont été observés dans le système d’aiguillage des patients. On a par exemple découvert que des patients avaient été orientés vers les principaux hôpitaux, en particulier pour des cas compliqués et urgents, avec une simple lettre de recommandation ne contenant pas l’historique requis et complet de leur traitement.
Chaîne d’approvisionnement
La quantification et les prévisions nationales relatives aux médicaments contre le VIH devraient être plus systématiques, avec des réunions régulières incluant toutes les parties prenantes, indique le Bureau de l’Inspecteur général. « Cela est nécessaire pour éviter les cas comme les commandes en urgence de médicaments antirétroviraux observées en 2017 et garantir la prise en compte des approvisionnements de partenaires comme l’UNICEF ». Il conviendrait en outre, ajoute le BIG, que les exercices de quantification et la gestion des stocks tiennent compte des stocks disponibles à tous les niveaux – et pas seulement au niveau central – afin d’éviter des risques de surstockage ou de surbudgétisation des produits de santé.
(Nous avons résumé à l’aide d’illustrations certaines des constatations du BIG dans ce domaine 🙂
Le système automatisé d’information de gestion de la logistique et des stocks, connu sous le nom d’OSPSanté, offre une opportunité significative pour résoudre bon nombre des problèmes susmentionnés, commente le Bureau de l’Inspecteur général. Bien que des données sur les stocks de la plupart des produits de lutte contre le paludisme et de certains produits de lutte contre le VIH soient déjà disponibles dans ce système, elles ne sont pas encore intégrées dans l’état national des stocks, « ni analysées pour éclairer les prises de décisions », indique le BIG. « Cela pourrait aider à éviter les ruptures de stock ou les surstockages ».
Problèmes précédemment identifiés
Le Bureau de l’Inspecteur général a lancé un audit du portefeuille du Mali en 2010, mais du fait d’importantes irrégularités financières, l’audit a été annulé et remplacé par une enquête. Cette dernière a permis d’identifier des fraudes bancaires, des détournements de fonds, des fraudes au niveau des dépenses, des irrégularités concernant les achats et un manque de supervision. D’après le BIG, ces problèmes étaient essentiellement imputables à l’insuffisance des capacités de gestion financière des programmes nationaux de lutte contre les maladies, qui agissaient à titre de récipiendaires principaux des subventions. À la suite de cela, de nouveaux récipiendaires ont été recrutés, et les programmes nationaux ont continué de mettre en œuvre les services de santé tout en faisant fonction de sous-récipiendaires. Le Fonds mondial a aussi institué des mesures d’atténuation des risques, notamment une politique d’absence de trésorerie au niveau des sous-récipiendaires. Cette politique a ultérieurement été assouplie par l’utilisation d’une trésorerie restreinte par les sous-récipiendaires, précise le BIG, les récipiendaires principaux effectuant, en vertu de ces dispositifs, l’essentiel des paiements aux fournisseurs.
L’Observateur du Fonds mondial a largement couvert ces événements dans sa version anglaise (notamment dans les articles disponibles ici, ici et ici).