LE MALAWI VEUT TOURNER LA PAGE DU SCANDALE FINANCIER DE SA COMMISSION CONTRE LE SIDA
Author:
Owen Nyaka
Article Type:Article Number: 6
La sociĆ©tĆ© civile signale un profond dĆ©sĆ©quilibre des activitĆ©s dĆ©crites dans la note conceptuelle qui vient dāĆŖtre prĆ©sentĆ©e
RĆSUMĆ Le Malawi veut se sortir des rouages dāun scandale financier impliquant la Commission nationale de lutte contre le sida et passer Ć la phase suivante de sa riposte au VIH. Mais le pays est confrontĆ© Ć dāautres problĆØmes, sur fond de plaintes Ć©manant dāorganisations de la sociĆ©tĆ© civile selon lesquelles celles-ci sont sous-reprĆ©sentĆ©es dans les activitĆ©s prĆ©vues au titre dāune nouvelle proposition de subvention dāun montant de 574 millions US$.
EspĆ©rant tourner la page dāun scandale financier impliquant la Commission nationale de lutte contre le sida, le Malawi a nommĆ© deux nouveaux rĆ©cipiendaires principaux qui seront chargĆ©s dāadministrer les 574 millions US$ allouĆ©s Ć la lutte contre le VIH.
Le pays a soumis sa note conceptuelle le 30 janvier, dans le cadre du cinquiĆØme crĆ©neau de soumission du nouveau modĆØle de financement. Les ONG internationales ActionAID et WorldVision, ainsi que le ministĆØre de la SantĆ©, ont Ć©tĆ© choisis comme nouveaux rĆ©cipiendaires principaux pour remplacer la Commission nationale de lutte contre le sida, empĆŖtrĆ©e dans un scandale financier depuis que son ancien directeur exĆ©cutif a Ć©tĆ© accusĆ© dāavoir dĆ©tournĆ© des centaines de milliers de dollars.
Des sources internes Ć lāinstance de coordination nationale ont indiquĆ© Ć Aidspan que lors dāune rĆ©cente visite, une dĆ©lĆ©gation du Fonds mondial avait exprimĆ© sa constante prĆ©occupation Ć propos de la gestion financiĆØre au sein du ministĆØre de la SantĆ©, mais quāelle souhaitait conserver lāorganisme public en tant que rĆ©cipiendaire principal, seul organe dotĆ© des facilitĆ©s nĆ©cessaires pour gĆ©rer la composante biomĆ©dicale des interventions. Le choix du ministĆØre de la SantĆ©, de WorldVision et dāActionAID comme rĆ©cipiendaires principaux a prĆ©cĆ©dĆ© la visite de la dĆ©lĆ©gation du Fonds.
Ces inquiĆ©tudes font Ć©cho Ć une lettre envoyĆ©e par le SecrĆ©tariat du Fonds en mars 2014 stipulant que Ā«Ā la performance globale des rĆ©cipiendaires principaux actuels avait Ć©tĆ© dĆ©gradĆ©e Ć B2 (inadĆ©quat) notamment en raison de faiblesses dans la gestion financiĆØre, ce qui a conduit Ć des dĆ©penses irrecevables ou injustifiĆ©es, et des retards dans lāorganisation de lāaudit externeĀ Ā».
Lors dāaudits externes rĆ©alisĆ©s sur la pĆ©riode 2011-2012, des dĆ©penses dāun montant de 1,4 million US$ avaient Ć©tĆ© identifiĆ©es comme irrecevables ou injustifiĆ©es. Un rapport dāaudit couvrant la pĆ©riode 2012-2013 doit encore ĆŖtre rĆ©digĆ©; aucune date nāa encore Ć©tĆ© fixĆ©e pour lāexamen des comptes de lāexercice 2013-2014.
Le Malawi a toutefois commencĆ© Ć mettre en Åuvre des rĆ©formes de la gestion des finances publiques ainsi que des mesures visant Ć renforcer ses systĆØmes de gestion des achats et de la chaĆ®ne logistique. Il a en outre mis en place un agent financier au ministĆØre de la SantĆ©.
Au-delĆ de la gestion financiĆØre, il reste encore dāautres difficultĆ©s Ć surmonter. Lors dāune rĆ©union avec les membres de la dĆ©lĆ©gation du Fonds, les reprĆ©sentants de la sociĆ©tĆ© civile ont exprimĆ© un certain nombre dāinquiĆ©tudes sur le fait quāils nāĆ©taient pas suffisamment reprĆ©sentĆ©s dans le dialogue national ou le processus dāĆ©laboration de la note conceptuelle pour le VIH et la tuberculose, mais aussi sur lāimpact quāavait eu la note soumise en janvier dernier.
Les reprĆ©sentants des groupes de populations-clĆ©s remarquent Ć©galement que la note conceptuelle met peu lāaccent sur lāenvironnement juridique et politique dans lequel ils Ć©voluent. La stigmatisation et la discrimination se sont institutionnalisĆ©es au Malawi, lāun des 34 pays dāAfrique subsaharienne dotĆ©s dāune lĆ©gislation qui Ć©rige lāhomosexualitĆ© en crime. Il nāexiste en outre aucune loi anti-discrimination permettant aux personnes vivant avec le VIH de signaler les individus qui les empĆŖcheraient dāavoir accĆØs aux services.
Les budgets affectĆ©s aux diverses activitĆ©s sont largement dĆ©sĆ©quilibrĆ©s, indiquent-ils, la plupart des fonds Ć©tant allouĆ©s au traitement et trĆØs peu Ć la prĆ©vention et aux catalyseurs essentiels (ces activitĆ©s qui renforcent lāefficacitĆ© des programmes en place, telles que celles liĆ©es aux questions de genre et aux droits humains). Si la prĆ©vention et les catalyseurs essentiels sont du ressort de la sociĆ©tĆ© civile, les activitĆ©s relatives au traitement des maladies relĆØvent gĆ©nĆ©ralement de la compĆ©tence de lāEtat.
La note conceptuelle ne prĆ©voit pas dāinvestir suffisamment dans le renforcement des systĆØmes communautaires, ont indiquĆ© Ć Aidspan des reprĆ©sentants de la sociĆ©tĆ© civile. Depuis la subvention de la sĆ©rie 8, le budget allouĆ© aux activitĆ©s de renforcement des systĆØmes communautaires a considĆ©rablement chutĆ©, remarquent-ils, est passant de 8 millions Ć 1 million US$ sur la pĆ©riode dāallocation 2015-2017. Une augmentation de 30 millions US$ des financements nationaux au cours des trois prochaines annĆ©es permettrait de remĆ©dier Ć cette situation.
Lors de sa visite, lāĆ©quipe du Fonds mondial a encouragĆ© les responsables locaux Ć Ć©toffer davantage la note conceptuelle afin de rĆ©pondre Ć ces inquiĆ©tudes, mais presque rien nāa Ć©tĆ© fait pour modifier cette note prĆ©sentĆ©e au cours du cinquiĆØme crĆ©neau de soumission. Ces questions seront vraisemblablement soulevĆ©es lors de lāexamen, prĆ©vu en mars, par le ComitĆ© technique dāexamen des propositions.
Owen Nyaka est membre du rĆ©seau des correspondants clĆ©s de lāAlliance internationale contre le VIH/sida.Ā