LA TRANSPARENCE EST UN PRINCIPE FONDATEUR DU FONDS MONDIAL: OÙ EST-ELLE DONC?
Author:
Aidspan
Article Type:Article Number: 3
Le Conseil d'administration du Fonds mondial veut non seulement plus de réunions, mais aussi une meilleure "communication de données transparentes et régulières sur les performances et les résultats".
RÉSUMÉ Il se passe tellement de choses en 2022 que le Conseil d'administration du Fonds mondial a sollicité plus de réunions cette année afin d'aborder les sujets nécessitant plus d'attention. Il souhaite également discuter de comment mieux "communiquer des données transparentes et régulières sur les performances et les résultats". Mais sur ce point, au fil des ans, le niveau d'ouverture du Fonds mondial a baissé au lieu de s’améliorer. La transparence a régressé. Est-ce l’hôpital qui se moque de la charité ?
Le 13 juillet 2022, un organisme international de référence en matière de transparence de l’aide a publié son indice de transparence de l’aide qui classe le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme dans la catégorie “Bon”. L’ Indice de transparence de l’aide 2022 , de “Publish What You Fund”, qui est actuellement la seule mesure indépendante de la transparence de l’aide, indique que le Fonds mondial continue d’obtenir les meilleurs résultats dans la composante finances et budgets, mais que l’organisation a perdu des points dans les composantes programmatiques au cours des deux dernières années. Le dernier rapport formule plusieurs recommandations sur la manière dont le Fonds mondial peut s’améliorer.
En publiant le classement sur son site web, le Fonds mondial a déclaré que son partenariat s’est engagé à faire de la transparence de l’aide l’un de ses principes fondateurs. Il affirme avoir déployé des efforts considérables pour améliorer continuellement la qualité, la quantité et les délais de production de ses rapports. En 2022, le Fonds mondial déclare qu’il est en train de prendre des mesures pour accroître la disponibilité des données programmatiques et fournir plus de détails sur les résumés par pays via ses plateformes numériques. Le Fonds mondial affirme qu’il continuera à répondre aux préoccupations mentionnées dans le cadre du dernier indice.
Espérons en effet que le Fonds mondial y prête une attention soutenue. Car nous avons le sentiment, et l’avons dit à plusieurs reprises, que le Fonds mondial est aujourd’hui beaucoup moins ouvert sur diverses questions qu’il ne l’était auparavant.
Notre article sur la transparence du Fonds mondial commence par examiner la retraite du conseil d’administration du Fonds mondial qui s’est tenue le 8 juillet, l’une des réunions supplémentaires organisées en réponse aux appels à plus d’engagement en vue de mener à bien le programme de travail intense de l’année. Nous poursuivons en ajoutant que la nécessité d’organiser davantage de réunions est réelle, mais l’honnêteté et la transparence ne devraient-elles pas passer en priorité?
Retraite du Conseil d’administration
Être membre de l’un des trois comités Audit et Finance (AFC), Éthique et Gouvernance (CEG), stratégique (CS) ou du Conseil d’administration du Fonds mondial n’est pas de tout repos en tout temps.
Dans l’ensemble, les membres sont très assidus. En plus de leur emploi “de jour” rémunéré, ils doivent travailler dur sans contrepartie financière, mais uniquement pour contribuer spirituellement au “bien commun”. Ils doivent affronter une pléthore de documents en jargon du Fonds mondial. Nombreux sont ceux dont la langue maternelle n’est ni l’anglais ni le français, ce qui rend la tâche encore plus ardue lorsqu’il s’agit d’aborder des concepts dont la traduction n’est pas facile – pensez à “effet catalytique”! Et ils doivent assister à de nombreuses réunions, virtuelles, en présentiel ou hybrides, dans des langues que beaucoup d’entre eux ne maîtrisent pas. Pas étonnant qu’il soit si difficile d’impliquer les activistes de terrain.
Les différentes circonscriptions s’efforcent consciencieusement de parcourir les documents de référence et de fournir leurs commentaires écrits sur des questions qui sont parfois mal décrites (diapositives McKinsey ou de type McKinsey) dans un mélange de langage de consultant en gestion et de jargon du Fonds, et d’acronymes d’enfer difficiles à retenir), Et pourtant, ils le font avec rigueur, et à juste titre, étant donné les implications financières de leur travail….
Cette année, 2022, est particulièrement exigeante. Tout d’abord, et surtout, il s’agit d’une année de reconstitution des ressources qui coïncide avec les discussions sur l’opérationnalisation de la nouvelle stratégie qui démarrera en 2023. En outre, les nouveaux documents relatifs au cycle de financement sont sur le point d’être diffusés afin de donner le coup d’envoi du processus de demande de subventions pour le cycle 2024-2026 ; les modèles de demande de financement et les instructions sont très différents des cycles précédents (comme on pouvait s’en douter…). Ils comprennent même des sections sur des questions telles que la prévention de l’exploitation, des abus et du harcèlement sexuels, un sujet très nouveau pour de nombreux membres des comités et du conseil d’administration. On a donc aucune idée ce que les membres de l’Instance de coordination nationale ( ICN ) et les autres parties prenantes nationales en feront, et encore moins s’ils seront en mesure de l’intégrer de manière adéquate dans leurs demandes de financement.
Comme si cela ne suffisait pas, ils ont dû faire face à la controverse entourant la nouvelle méthodologie d’allocation, les ajustements qualitatifs et les investissements catalytiques, pour n’en citer que quelques-uns, ainsi qu’à un surcroît de travail dû à la nécessité de rendre compte du flux de financement supplémentaire que constitue le mécanisme de riposte à la COVID-19 (C19RM).
Pendant ce temps, les deux gros éléphants dans la pièce sont les “maux” jumeaux que sont la préparation et la riposte aux pandémies (PPR) et les systèmes de santé résilients et pérennes (SSRP). En dépit de toutes les nombreuses consultations, il n’y a toujours pas d’avancée claire sur ce à quoi ces derniers ressembleront sur le plan opérationnel dans le cadre d’une nouvelle stratégie qui ne compte pas une mais dix (DIX !!) théories du changement (que le Secrétariat tente de minimiser en les appelant “mini” théories du changement ! et les “leviers” qui y sont associés. Malgré cette boîte de vitesses, la voiture n’a toujours pas quitté le garage, alors que nous nous efforçons de ne pas caler les vitesses et de faire réellement avancer la machine (et de mesurer ses performances, évidemment).
Pour couronner le tout, les comités ont changé de dirigeants au cours d’une année où la mémoire institutionnelle aurait pu être une bonne chose à conserver.
Compte tenu de tous ces facteurs, il n’est guère surprenant que, lors de la 47e réunion du conseil d’administration, les membres aient souhaité la tenue de discussions supplémentaires sur la mise en œuvre de la stratégie à l’approche de la septième reconstitution des ressources et du lancement du prochain cycle de subventions.
Quels sont les événements en perspective ?
Lors de la réunion du conseil d’administration de mai, les membres ont reconnu qu’il y avait BEAUCOUP de dossiers à traiter cette année. Le conseil d’administration a donc décidé de s’engager davantage sur les questions suivantes :
- Mise en œuvre de la stratégie, par la poursuite des discussions dans le cadre d’un programme global visant à mobiliser le conseil d’administration au cours des prochains mois. Cela comprendra des discussions détaillées dans les domaines thématiques clés, tel que convenu lors de la réunion du Conseil d’administration de mai (PPR, ICN, Communautés, Financement de la santé, Genre, et Façonnage des marchés de nouvelle génération).
- Cadres de S&E et d’indicateurs clés de performance (ICP): Il y aura un engagement large et préalable avec le conseil d’administration à ce sujet, y compris en juillet 2022, parallèlement aux discussions du comité de l’audit et des finances et du CS. L’accent sera mis, entre autres, sur les priorités clés des trois maladies, du SSRP et de la communauté, des droits et du genre ( CDG ), ainsi que sur la meilleure façon de “communiquer des données transparentes et régulières sur les performances et les résultats ” (voir nos réflexions à ce sujet plus loin dans le présent article).
- Établissement d’un agenda prioritaire avec les nouveaux dirigeants des comités afin de garantir une prise de décision et un suivi stratégique efficaces sur les sujets liés à la mise en œuvre de la stratégie.
- Rôle des partenaires : Un débat approfondi aura lieu au niveau du conseil d’administration, notamment sur leur rôle complémentaire dans la mise en œuvre de priorités spécifiques, les responsabilités et l’évolution de l’architecture de la santé mondiale.
- Budget pour les dépenses d’exploitation : Lors de la réunion de novembre 2022, le Conseil d’administration discutera et approuvera les priorités et les implications de la mise en œuvre de la stratégie. Le Secrétariat présentera également un texte narratif plus complet et une vue d’ensemble de la manière dont tous ces éléments de mise en œuvre interagissent, ce qui est absolument nécessaire.
Les dirigeants du conseil d’administration et le secrétariat, avec la contribution du groupe de coordination, ont réfléchi à la manière de répondre à ces demandes, ainsi qu’à la nécessité d’accorder suffisamment de temps et d’espace pour discuter de ces sujets importants et complexes. Ils ont proposé un agenda détaillé pour les mois à venir, qui intègre les éléments suivants : (i) des engagements distincts avec le CA tout en exploitant les réunions planifiées au sujet des priorités susmentionnées ; (ii) des consultations au niveau des pays; (iii) des réunions des comités et du CA jusqu’au mois de novembre inclus; et (iv) le maintien des comités et la mise à profit de leur travail pour soutenir les discussions du CA.
Le document GF/BR2022/01 “Note conceptuelle et programme indicatif de la retraite du CA” sera, nous l’espérons, bientôt disponible sur le site Internet du Fonds mondial, et contient tous les détails du programme proposé d’ici novembre.
Retraite du Conseil d’administration du 8 juillet
Le présent numéro de l’Observateur du Fonds mondial (OFM) se concentre spécifiquement sur la retraite du Conseil d’administration qui s’est tenue le 8 juillet 2022, après les réunions des comités du 6 au 7 juillet. Le programme de la retraite a couvert les points suivants :
- Un aperçu des échéances et des questions à venir pour les organes de gouvernance.
- Des discussions thématiques approfondies sur le financement de la santé et la préparation et la riposte aux pandémies (PPR), permettant au CA de discuter du paysage actuel du financement de la santé et de l’architecture mondiale de la santé, dans le contexte de la mise en œuvre de la stratégie.
- Des discussions sur les cadres de S&E et d’ICP, dans le prolongement des sessions des comités de juillet et en vue d’un engagement significatif du CA avant la prise de décision au cours de sa réunion de novembre.
- Discussions en petits groupes sur les ICN, les communautés et le genre, destinées à orienter les futures discussions des comités et du CA sur ces sujets.
Nous vous proposons une discussion plus approfondie de ces sujets à l’article 4 sur le S&E et le cadre des ICP, et à l’article 5 sur Plus de questions que de réponses : les parties prenantes sont impatientes d’obtenir des clarifications sur les plans de mise en œuvre de la nouvelle stratégie du Fonds mondial.
Et quid des questions de “transparence et de responsabilité”?
Juste une ultime salve à l’attention du Secrétariat et du CA: si le Fonds mondial veut vraiment savoir comment “mieux communiquer des données transparentes et régulières sur les performances et les résultats “, la solution nous semble évidente: il faut revenir à l’époque où l’on mettait TOUTES les informations sur les subventions dans le tableau de bord, et où l’on faisait circuler en temps utile et de manière exhaustive TOUS les documents de référence des comités et du CA à toutes les parties intéressées.
Nous avons mené une petite enquête pour voir exactement ce qui est accessible actuellement par rapport à ce qui se faisait il y a plusieurs années.
Au bon vieux temps, vous pouviez effectuer une recherche sur n’importe quel pays et trouver immédiatement ses demandes de financement/notes conceptuelles/demandes de subvention et les documents justificatifs tels que les rapports de performance des subventions, les lettres de gestion, les actions convenues de la Direction, les taux de tirage et d’absorption, etc. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Les puristes parmi vous diront peut-être que ces informations peuvent être trouvées quelque part dans les jeux de données. Eh bien, peut-être que certains pourraient l’être, mais bon sang ! il faut travailler dur pour avoir ce privilège. Et c’est sélectif. Ainsi, par exemple, certains des documents de demande de financement (soumis et examinés par le comité d’examen technique) sont effectivement disponibles (c’est-à-dire le formulaire narratif, le cadre de performance, les tableaux du paysage financier, les tableaux des écarts programmatiques et financiers), mais pas le plan de travail, ni le budget détaillé ou même sommaire, ni les rapports de performance des subventions ou les lettres de gestion.
Plus frustrant encore, nous n’avons trouvé aucun accord-cadre (autrefois appelé “accord de subvention”) signé entre le Fonds mondial et les récipiendaires principaux (et l’ICN) pour chaque subvention ; et qui comprenait un budget sommaire en annexe (par catégorie de coûts, domaine d’intervention, responsable de mise en œuvre). En fait, vous ne pouvez même plus voir les rapports de performance des subventions.
Et les données ne sont généralement pas à jour. Les informations sur les subventions multi-pays en sont un bon exemple.
Et quel est le secret qui entoure les documents de référence des comités ? Ceux-ci ne sont jamais publiés malgré les nombreuses demandes d’Aidspan et d’autres personnes en ce sens. Pourquoi ce mystère ? Et pourquoi faut-il un temps aussi long pour publier les documents du conseil d’administration sur le site Web, alors qu’en réalité, ils pourraient être publiés avant ou pendant la réunion proprement dite ? Par exemple, à l’heure où nous rédigeons ces lignes, les documents relatifs à la retraite du CA du 8 juillet ne sont toujours pas disponibles, plus d’une semaine après.
Quelles sont les informations auxquelles nous ne devons pas avoir accès même bien après les réunions proprement dites ?
Pour finir, et ce point est le plus important, il y a le fait que le Fonds mondial met les circonscriptions dans une position inconfortable et difficile. Les représentants des circonscriptions sont censés consulter leurs parties prenantes pour obtenir leurs commentaires, mais comment les membres des circonscriptions pourront-ils examiner et commenter des documents qui font l’objet d’un embargo en ce qui concerne la circulation externe et sont indiqués pour usage interne uniquement ? Il en va de même pour Aidspan. Nous sommes le surveillant indépendant officiel du Fonds mondial, mais nous ne recevons aucun document du Secrétariat, à l’exception des documents du CA en notre qualité d’observateurs du CA. Nous ne pouvons remplir notre mandat qui consiste à vous faire part, à vous, nos lecteurs, des commentaires sur les déclarations des comités et des circonscriptions du Fonds mondial, que si ceux qui les reçoivent prennent le risque de les partager avec nous. Quelle transparence !
Nous connaissons tous l’expression “ceux qui vivent dans des maisons de verre ne doivent pas jeter de pierres”. Cher Fonds mondial, bien que nous apprécions tout ce que vous faites, veuillez montrer l’exemple en matière de transparence et de responsabilité ! Et faites-le dans un langage clair et simple qui ne nécessite pas que le lecteur ait un diplôme de haut niveau en jargon du Fonds.