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Il est urgent de renforcer la coopération internationale au développement dans le contexte des crises mondiales : Rapport 2024 sur le financement du développement durable
OFM Edition 171

Il est urgent de renforcer la coopération internationale au développement dans le contexte des crises mondiales : Rapport 2024 sur le financement du développement durable

Author:

Samuel Muniu

Article Type:
NOUVELLES

Article Number: 3

Cet article met en lumière le rapport 2024 sur le financement du développement durable, qui explore les complexités de la coopération internationale au développement dans un monde sujet aux crises. Il examine les tendances et les défis de l'aide publique au développement (APD), le rôle des banques multilatérales de développement (BMD) et la nécessité de cadres de données innovants. Le rapport met l'accent sur les investissements dans les systèmes de données, l'utilisation responsable des données et la collaboration afin de libérer tout leur potentiel pour le développement durable.

Le rapport 2024 sur le financement du développement durable souligne le besoin pressant de renforcer la coopération internationale dans un contexte de crises mondiales croissantes. Il souligne l’importance de respecter les engagements en matière d’aide publique au développement (APD) et de financement de la lutte contre le changement climatique pour relever les défis posés par le changement climatique, le COVID-19 et l’instabilité économique. Le rapport plaide en faveur de critères de vulnérabilité dans les financements concessionnels, en particulier pour les petits États insulaires en développement (PEID) et les autres nations vulnérables, et souligne le rôle essentiel des banques multilatérales de développement (BMD) et des financements mixtes dans la mobilisation de l’investissement privé. Il met également l’accent sur l’augmentation des financements destinés à la lutte contre le changement climatique et à la préservation de la biodiversité, ainsi que sur les investissements dans les systèmes de données et sur l’abandon du PIB comme mesure du progrès, en préconisant des efforts mondiaux coordonnés pour améliorer l’atténuation des risques et l’élaboration des politiques.

 

L’aide publique au développement n’est pas à la hauteur des besoins et des engagements mondiaux

 

Le rapport souligne qu’en dépit des records atteints, l’APD n’a pas suivi le rythme des besoins mondiaux croissants. En 2022, l’APD des membres du Comité d’aide au développement (CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a augmenté de 17 % pour atteindre 211 milliards de dollars (figure 1), principalement en raison de l’augmentation des dépenses consacrées aux réfugiés et à l’aide à l’Ukraine. Si l’on exclut le coût des réfugiés, l’APD a augmenté de 7,3 %. Toutefois, de nombreux pays ne respectent toujours pas leurs engagements en matière d’aide, seuls quelques-uns atteignant l’objectif de 0,7 % du revenu national.

 

Figure 1 : Aide publique au développement, 2018-2022

 

L’augmentation des dépenses consacrées aux réfugiés et à l’aide humanitaire, qui sont passées de 9 % du total de l’APD en 2000 à 25 % en 2022, détourne les fonds des objectifs à long terme tels que les objectifs de développement durable (ODD). En 2022, l’aide aux pays les moins avancés (PMA) et à l’Afrique subsaharienne diminuera respectivement de 5,2 % et de 8,6 %. L’augmentation de l’APD est essentielle pour relever les défis du développement durable.

 

Depuis la pandémie, les engagements d’APD en faveur de l’égalité des sexes ont diminué. Depuis 2011, l’APD des pays du CAD pour l’égalité des sexes a augmenté régulièrement, atteignant une moyenne de 60 milliards de dollars par an, soit 45 % de l’aide totale en 2019/20. Toutefois, bien que le montant global continue d’augmenter, la part est tombée à 43 % en 2021/22. L’intégration de l’égalité des sexes reste faible, en particulier dans les secteurs de l’humanitaire et de l’énergie, malgré ses avantages. Avec l’augmentation des besoins concurrents, il y a un risque de détournement des financements. Les pays donateurs doivent donner la priorité à une APD axée sur l’égalité des sexes et améliorer les garanties des politiques en la matière. Un leadership fort et des programmes bien conçus sont essentiels pour faire progresser l’APD en faveur de l’égalité des sexes.

 

En 2022, une mise à jour importante a été apportée au cadre d’indicateurs des ODD en introduisant un nouvel indicateur, 17.3.1, qui se concentre sur la mobilisation de ressources financières supplémentaires pour les pays en développement à partir de diverses sources. Cet indicateur vise à garantir que les flux financiers sont conformes aux ODD et comprend des critères spécifiques pour mesurer leur durabilité. Il se compose de six sous-indicateurs couvrant différents types de soutien financier, notamment les subventions et les prêts en faveur du développement durable, les investissements directs étrangers, les financements privés mobilisés et les subventions privées. La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) et l’OEC sont conjointement chargées de superviser la notification mondiale de cet indicateur afin de garantir la cohérence et d’éviter les doublons dans la collecte des données.

 

Améliorer l’attribution des financements concessionnels grâce à des critères de vulnérabilité

 

Le rapport souligne la nécessité d’adapter le financement concessionnel en intégrant des critères de vulnérabilité en raison de l’augmentation des risques systémiques et de la fréquence et de la gravité des catastrophes naturelles. Les PEID peinent à mobiliser des ressources nationales et dépendent fortement de l’APD, tandis que les PEID à revenu élevé sont confrontés à une dette extérieure importante.

 

L’émergence de l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle (IVM) offre une approche prometteuse pour améliorer l’évaluation des besoins de financement. En offrant un moyen complet de caractériser et de mesurer les vulnérabilités, l’IVM complète les critères basés sur le revenu, en mettant en évidence les défis structurels nuancés auxquels les nations vulnérables sont confrontées et en soulignant l’importance de renforcer la résilience structurelle pour un développement durable.

 

Cependant, l’intégration de critères de vulnérabilité dans les décisions d’allocation nécessite une analyse minutieuse afin de prendre en compte les impacts potentiels sur tous les pays éligibles et d’assurer l’alignement avec les critères d’éligibilité des cadres d’allocation existants. Il reste essentiel de trouver un équilibre entre la nécessité de remédier à la vulnérabilité, la distribution équitable et l’efficacité du financement concessionnel.

 

Banques multilatérales de développement : Les piliers du développement mondial

 

Les BMD sont des fournisseurs essentiels de financements abordables et à long terme pour les pays en développement, en particulier en période de crise. Les BMD ont élargi leur champ d’action des infrastructures à la réduction de la pauvreté, à la santé et à l’éducation. Toutefois, le rapport note un déclin des financements concessionnels, ce qui pose des problèmes aux pays à faible revenu. « Que la part des financements concessionnels dans le total des prêts des BMD aux pays en développement a augmenté au début des années 2000, elle a diminué depuis », observe le rapport.

 

Les BMD mettent en œuvre des réformes pour renforcer leur capacité financière, notamment en améliorant la gestion de leurs fonds, en offrant de nouveaux types de garanties et en créant de nouveaux produits financiers. Le rapport souligne l’importance d’une coopération plus étroite entre les BMD et les banques publiques de développement (BPD), qui sont des institutions appartenant à l’État qui contribuent au développement économique, fonctionnent de manière indépendante et n’offrent pas de services bancaires réguliers tels que des comptes personnels ou des prêts à la consommation. Cette coopération vise à renforcer le système des banques de développement et à accroître son impact. Toutefois, le rapport ne s’attarde pas sur les problèmes structurels des BMD qui entravent leur efficacité et leur efficience. Si l’on ne s’attaque pas à ces problèmes fondamentaux, les réformes proposées risquent de ne pas produire les résultats escomptés.

 

Mobiliser l’investissement privé pour le développement durable

 

Le rapport souligne que le financement mixte, qui tire parti du financement public du développement pour attirer l’investissement privé, est essentiel pour le développement durable. Cependant, la croissance du financement mixte a été entravée par les défis économiques mondiaux. La plupart des financements mixtes sont destinés aux pays à revenu intermédiaire, ce qui limite l’accès des PMA. Ce déséquilibre souligne la nécessité de ne plus se contenter de rechercher des projets financièrement viables, mais de donner la priorité aux initiatives ayant un impact dans les PMA.

 

Pour relever ces défis, le rapport souligne l’importance d’adhérer aux principes directeurs énoncés dans le programme d’action d’Addis-Abeba. Ces principes soulignent la nécessité d’aligner les activités de financement mixte sur les priorités nationales de développement, de donner la priorité à l’impact sur le développement plutôt qu’à l’effet de levier financier, et de garantir la rentabilité par rapport à d’autres mécanismes de financement. En outre, diverses organisations ont élaboré leurs propres principes pour le financement mixte, visant à maximiser son impact sur les objectifs de développement durable.

 

Combler le déficit de financement pour le changement climatique et la conservation de la biodiversité

 

Le rapport souligne la nécessité urgente d’augmenter les ressources financières pour relever les défis du changement climatique et de la biodiversité, en particulier dans les pays vulnérables. Les financements actuels en faveur du climat et de la biodiversité sont insuffisants, et les investissements privés dans l’adaptation restent inadéquats. L’allocation disproportionnée du financement climatique aux pays les plus vulnérables souligne la nécessité d’une plus grande coopération internationale.

 

Les BMD jouent un rôle essentiel dans le financement de l’action climatique, mais elles doivent veiller à ce que le financement de l’atténuation soit complémentaire et orienté vers les pays qui en ont le plus besoin. Le rapport souligne la complexité et la fragmentation de l’architecture du financement climatique mondial, qui pose des problèmes de coordination et d’accès au financement, en particulier pour les pays en développement. La réforme et la rationalisation de cette architecture sont essentielles pour une mobilisation efficace du financement climatique.

 

Outre l’action climatique, le rapport souligne le besoin urgent d’augmenter les ressources financières pour stopper et inverser le déclin de la biodiversité. La perte de biodiversité pose des risques systémiques pour le bien-être humain et le développement durable, mais les niveaux de financement actuels sont insuffisants. Malgré certains progrès, le déficit de financement de la biodiversité persiste, ce qui nécessite des efforts supplémentaires pour mobiliser des ressources en faveur de la conservation et de la restauration de la biodiversité.

 

Pour soutenir les objectifs de conservation de la biodiversité, des initiatives telles que le Fonds-cadre mondial pour la biodiversité ont été lancées grâce aux contributions des pays développés. Toutefois, les solutions fondées sur la nature ont besoin d’un financement plus important, car elles se heurtent à des obstacles tels que l’absence de rendements financiers compétitifs et de méthodes de suivi cohérentes.

 

Le rapport note que les discussions sur le financement du climat au niveau mondial ont atteint un moment charnière à la fin de 2023 avec la création du Fonds pour les pertes et dommages, une avancée significative dans la lutte contre les effets du changement climatique. Initialement proposé dans le plan d’action de Bali en 2007 et ayant pris de l’ampleur à partir de 2013, le fonds a été créé lors de la 27e conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP27) en 2022 pour aider les pays vulnérables à faire face aux catastrophes climatiques.

 

La création du Fonds pour les pertes et dommages met en évidence la reconnaissance du fait que les nations développées, largement responsables des émissions historiques, ont l’obligation morale d’aider les pays en développement. Lors de la COP28, les gouvernements se sont engagés à verser environ 700 millions de dollars au fonds, initialement hébergé par la Banque mondiale. Toutefois, compte tenu des pertes annuelles liées au climat qui devraient s’élever à environ 400 milliards de dollars pour les pays en développement d’ici à 2030, il est impératif de prendre d’autres engagements financiers et de mobiliser les investissements privés.

 

Pour garantir l’efficacité du Fonds des pertes et dommages, la coordination avec les initiatives existantes en matière d’adaptation au changement climatique et d’atténuation de ses effets est cruciale. L’alignement des efforts et le comblement des lacunes de l’architecture actuelle permettront de maximiser l’impact du fonds et d’aider les communautés vulnérables à s’adapter aux effets du changement climatique et à les atténuer. Si le rapport reconnaît l’insuffisance du financement actuel de la lutte contre le changement climatique, il ne fournit pas de feuille de route détaillée pour financer et gérer de manière adéquate le Fonds des pertes et dommages.

 

Investissements dans les systèmes de données

 

Le rapport souligne que les investissements dans les systèmes de données sont fondamentaux pour le développement durable, en déclarant : « Les investissements dans les données rapportent des dividendes. Le sous-investissement dans les systèmes de données publiques et les activités statistiques continue de compromettre la poursuite du développement durable ». Cette déclaration met l’accent sur les retombées économiques qui peuvent être obtenues grâce à un investissement adéquat dans les données, ce qui est essentiel pour élaborer des politiques éclairées et suivre les progrès accomplis.

 

Innovation et accès aux données

 

Les sources de données innovantes, telles que les données numériques et administratives, sont de plus en plus reconnues pour leur potentiel à compléter les sources de données traditionnelles. Toutefois, le rapport note que « l’accès aux données reste un défi ». L’inclusion de nouvelles sources de données peut fournir des informations en temps réel et améliorer la profondeur et la représentation des statistiques officielles, ce qui est vital pour une prise de décision rapide et efficace dans divers secteurs, y compris le travail humanitaire et les droits de l’homme.

 

Aller au-delà du PIB

Le Bhoutan est connu pour ne pas se limiter à la croissance économique et pour utiliser des mesures telles que le bonheur national brut (BNB) au lieu du seul PIB. Depuis 1979, le Bhoutan utilise l’indice du bonheur national brut, qui prend en compte divers aspects du bien-être au-delà de l’argent. L’indice BNB, élaboré en trois ans avec la contribution de nombreux groupes, comporte neuf domaines et 33 indicateurs (figure 2) qui reflètent les valeurs bhoutanaises. Il guide les politiques nationales, les indicateurs du BNB étant utilisés dans la planification. Les nouvelles politiques sont vérifiées à l’aide d’un outil d’évaluation des politiques du BNB pour voir comment elles affectent le bien-être. Le Bhoutan se concentre sur les énergies renouvelables et la protection de la biodiversité en raison de son engagement en faveur du BNB. Sa stratégie touristique donne la priorité à la préservation de la culture et de l’environnement. Depuis 2015, le Bhoutan a également inclus les objectifs de développement durable dans son indice du BNB et dans ses politiques, alignant ainsi ses efforts sur les objectifs mondiaux de développement durable.

Le rapport appelle à dépasser les indicateurs économiques traditionnels tels que le PIB, en affirmant que « l’attention excessive portée au revenu par habitant et au niveau du produit intérieur brut (PIB) masque les progrès accomplis dans les trois dimensions du développement durable ». Il existe un consensus de plus en plus large sur le fait que le PIB ne permet pas à lui seul d’appréhender l’ensemble du spectre du développement durable, qui comprend le bien-être social et la santé environnementale (voir les informations sur le Bhoutan ci-dessous). Cette perspective s’aligne sur les efforts internationaux croissants visant à développer et à adopter un ensemble plus complet d’indicateurs qui reflètent mieux les progrès durables. 

 

Figure 2 : Les neuf domaines de l’indice du bonheur national brut (BNB) du Bhoutan

 

 

Financement du développement

 

Le rapport souligne également la nature fragmentée des systèmes actuels de données financières, qui entrave l’efficacité de l’atténuation des risques et de l’élaboration des politiques. Il souligne que « les données financières sont essentielles à l’atténuation des risques et à l’élaboration des politiques, mais qu’il n’existe pas de cadre général unique qui réunisse les différentes parties du système international ». Ce manque de coordination souligne la nécessité d’une approche unifiée des données financières qui puisse mieux soutenir les objectifs de développement durable.

 

Améliorer les données et les systèmes statistiques pour les objectifs de développement durable

 

Le rapport souligne qu’il est essentiel d’investir dans des systèmes de données et de statistiques qui produisent des informations exploitables pour réaliser des progrès significatifs dans la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Ces informations permettent de prendre des décisions éclairées, d’optimiser l’affectation des ressources et de mesurer l’impact des interventions, ce qui, en fin de compte, fait progresser le développement mondial.

 

Selon le rapport, une architecture de financement mondiale coordonnée est en train d’émerger pour libérer le potentiel des données pour le développement et l’analyse des risques à grande échelle. Cette architecture implique la mise en commun des ressources et la définition de priorités entre les États membres, ce qui favorise la collaboration et l’efficacité. En travaillant ensemble, les pays peuvent tirer parti de leur expertise collective et de leur financement pour créer des systèmes de données robustes qui servent le bien commun.

 

La quatrième conférence internationale sur le financement du développement, prévue du 30 juin au 3 juillet 2025 en Espagne, est l’occasion pour les États membres de se mettre d’accord sur ces priorités et sur les stratégies de mise en commun des ressources. La conférence se tiendra au plus haut niveau politique possible, avec la participation des chefs d’État et de gouvernement, des ministres concernés (finances, affaires étrangères et coopération au développement) et d’autres représentants spéciaux. En se concentrant sur des structures de financement coordonnées, la conférence vise à rationaliser les efforts et à garantir que les investissements dans les systèmes de données sont à la fois efficaces et durables.

 

 

 

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