ENTRETIEN AVEC SIMON KABORE
Author:
Christian Djoko
Article Type:Article Number: 4
RĆSUMĆ Plus dāun mois aprĆØs la fin de la confĆ©rence de la septiĆØme reconstitution des ressources qui sāest tenue Ć New-York, lāOFM a souhaitĆ© donner la parole Ć un acteur des organisations de la sociĆ©tĆ© civile afin de recueillir son avis sur les engagements des donateurs et les enjeux du prochain cycle triennal. Monsieur Simon KABORE est le directeur exĆ©cutif rĆ©gional du RĆ©seau AccĆØs aux MĆ©dicaments Essentiels (RAME), une organisation basĆ©e Ć Ouagadougou au Burkina Faso.
Le Fonds mondial a rĆ©coltĆ© 14,25 milliards de dollars amĆ©ricains lors de la septiĆØme confĆ©rence de reconstitution des ressources vient de sāachever Ć New-York. On est loin du montant minimal de 18 milliards de dollars sollicitĆ© par le Fonds mondial. En tant que membre des organisations de la sociĆ©tĆ© civile, quāest-ce que cela vous inspire ?
Cāest vraiment dommage de constater que le monde nāa pas pu rassembler 18 milliards de dollars pour viser lāĆ©limination de trois maladies qui occasionnent encore de milliers de pertes en vies humaines. Quand on sait que la solidaritĆ© occidentale a permis de mobiliser rapidement 84,2 milliards dāeuros pour lāUkraine (un seul pays), il est trĆØs difficile de comprendre lāincapacitĆ© manifeste du monde entier Ć rassembler 18 milliards de dollars pour le bĆ©nĆ©fice de plus dāune centaine de pays touchĆ©s par le VIH/SIDA, la tuberculose et le paludisme.
Quelle apprĆ©ciation portez-vous sur lāengagement des Ć©tats africains au cours de cette reconstitution des ressources?
Personnellement, je trouve que les Ć©tats africains ont pris des engagements pour laĀ forme. Plus largement, il y a lieu d’interroger la pertinence de lāengagement de ces Ć©tatsĀ dans cet exercice deĀ reconstitution dont ils sont en mĆŖme temps les principaux bĆ©nĆ©ficiaires. En fait, nous sommes quelques fois en prĆ©senceĀ d’unĀ jeu de dupes. Dans la mise en Åuvre des subventions, on va encore demander le financement de contrepartie des Ćtats. Cela ressemble Ć une double imposition. Lāaccent doit ĆŖtre mis Ć mon sens dans laĀ contribution directe des pays bĆ©nĆ©ficiaires dans les plans stratĆ©giques des maladies etĀ le renforcement des systĆØmes de santĆ©, plutĆ“t que dans la reconstitution des ressources du Fonds.
Avez-vous le sentiment que la voix des OSC a ƩtƩ entendue et prise en compte ?
Si la voix des OSC avait Ć©tĆ© entendue et prise en compte, on aurait sans doute dĆ©passĆ© les 18 milliards de dollars sollicitĆ©s. Jāai suivi par exemple le tĆ©moignage de Dr BembĆ©lĆ© de ARCAD SantĆ© Plus sur la situation du Mali. Je ne sais pas ce que les pays donateurs veulent de plus comme argument pour se mobiliser davantage. Il y a lieu de dĆ©plorer la baisse du degrĆ© de sensibilitĆ© de ces donateurs.
Quelles attentes avez-vous Ć lāĆ©gard du Fonds mondial pour le prochain cycle triennal?
Le Fonds mondial doit avoir le courage de revoir son mode dāoctroi et de suivi des financements. Il importe de trouver un Ć©quilibre juste et raisonnable entre la rĆ©alisation des rĆ©sultats et le respect de lāorthodoxie des rĆØgles financiĆØres. En l’absence d’un tel cas de figure, le risque est grand de compromettreĀ les rĆ©sultats sans forcĆ©ment assurer une bonne utilisation des ressources. Fort de ce qui prĆ©cĆØde, je propose quāil adopte la redevabilitĆ© communautaire, laquelle rend chaque communautĆ© bĆ©nĆ©ficiaire responsable du suivi des ressources qui lui sont consacrĆ©es. La pression que ces communautĆ©s exerceront sur les prestataires sera plus efficace que tous les mĆ©canismes actuels de LFA et dāagences fiduciaires. Cette solution seraĀ moins coĆ»teuse et plus efficiente.
Pour terminer, souhaitez-vous aborder un sujet ou une problĆ©matique, non Ć©voquĆ©e au cours de cette entretenue, qui mĆ©riterait selon vous dāĆŖtre discutĆ©e?
Ce nouveau cycle doit permettre la mise en place de vĆ©ritables systĆØmes communautaires pĆ©rennes dans nos pays, et non pas des interventions communautaires isolĆ©es, prĆ©caires voire Ć©phĆ©mĆØres.