OFM Edition 186, Article Number: 1
ABSTRACT
Ce numéro spécial de l’OFM consacré à la huitième reconstitution des ressources du Fonds mondial souligne l’ampleur du déficit de financement révélée à Johannesburg, tout en montrant comment cette fragilisation de la solidarité internationale expose davantage l’Afrique. Ce numéro met en lumière les risques d’une nouvelle « austérité sanitaire », mais aussi les opportunités de renforcer la souveraineté, l’alignement sur les systèmes nationaux et la redevabilité locale. Il appelle enfin à repenser la coopération internationale pour préserver à la fois l’efficacité et la justice dans la lutte contre les trois maladies.
Cher(e)s abonné(e)s,
La huitième reconstitution du Fonds mondial, tenue le 21 novembre à Johannesburg, restera moins dans les mémoires pour son montant que pour ce qu’il révèle. Les 11,34 milliards de dollars mobilisés - bien en-deçà de l’objectif de 18 milliards - constituent plus qu’un manque financier [CD1] : ils témoignent d’un affaiblissement silencieux de la solidarité internationale. Le discours de la responsabilité partagée demeure, mais l’ossature financière qui le soutenait s’effrite.[CD2]
Cette tension se manifeste avec une acuité particulière en Afrique - continent toujours au cœur des trois pandémies, mais aussi premier exposé aux conséquences du désengagement mondial. Une forme nouvelle d’« austérité sanitaire » s’installe : double étau entre retrait des bailleurs et sous-investissement chronique des gouvernements africains[CD3] . Il en résulte un paradoxe de dépendance, pris entre fatigue extérieure et inertie intérieure.
Pourtant, au sein même de cette crise, une bifurcation apparaît. Une transition, discrète mais réelle, s’esquisse : passer de la survie à la souveraineté. La décision du Fonds mondial d’intégrer progressivement ses financements dans les systèmes nationaux de gestion des finances publiques - comme l’a illustré la rencontre de Dakar - ouvre la voie à un nouveau pacte[CD4] . Bien menée, cette intégration peut renforcer les institutions, consolider la confiance, et ancrer durablement le financement de la santé dans les structures nationales. Mal conduite, elle pourrait au contraire reproduire les asymétries et marginaliser les communautés qui ont porté l’essentiel de la riposte.
La même logique prévaut pour la collaboration accrue avec les institutions supérieures de contrôle[CD5] . Sortir des audits parallèles onéreux pour s’appuyer sur des mécanismes publics pérennes n’est pas qu’un geste technique : c’est une affirmation de souveraineté et de dignité. La transparence ne doit plus être importée - elle doit être institutionnalisée.
Mais un autre mouvement, plus géopolitique, redessine le paysage. La nouvelle stratégie américaine de santé mondiale - pragmatique, transactionnelle et axée sur la sécurité - reconfigure les termes de la coopération[CD6] . En liant l’aide aux intérêts nationaux et en privilégiant les accords bilatéraux, elle fragilise l’idéal multilatéral qui a permis la naissance du Fonds mondial. L’efficacité pourrait y gagner, l’équité pourrait s’y perdre.
Johannesburg n’a donc pas été un échec : ce fut un miroir. Le reflet d’un monde en transition, où la grammaire morale de l’aide est en train de se réécrire. Le défi n’est plus seulement de combler un déficit, mais de restaurer une cohérence : articuler réalisme et solidarité, souveraineté et interdépendance, efficacité et justice.
Le Fonds mondial se retrouve une nouvelle fois à un carrefour. Il peut gérer le déclin - ou impulser le renouveau. Ce choix déterminera non seulement la prochaine reconstitution, mais aussi la signification future de la santé mondiale.
Comme toujours, Aidspan et son équipe de rédaction, sous la direction d'Ida Hakizinka, font de leur mieux pour assurer l'exactitude des données et des déclarations dans nos articles publiés - et donc l'inclusion d'hyperliens - mais si vous, le lecteur, identifiez une erreur ou une omission importante, veuillez-nous en informer et nous fournir la source de vos données ; nous serons heureux de publier une correction ou un amendement.
Si vous appréciez l’OFM et le trouvez pertinent pour votre travail, veuillez encourager vos collègues et ami(e)s à s'abonner.
Les suggestions et commentaires peuvent nous être adressés à Ida Hakizinka ou Christian Djoko Kamgain, PhD, en anglais, français ou espagnol, à l'adresse ida.hakizinka@aidspan.org ou christian.djoko@aidspan.org.
Cher(e)s abonné(e)s,
La huitième reconstitution du Fonds mondial, tenue le 21 novembre à Johannesburg, restera moins dans les mémoires pour son montant que pour ce qu’il révèle. Les 11,34 milliards de dollars mobilisés - bien en-deçà de l’objectif de 18 milliards - constituent plus qu’un manque financier [CD1] : ils témoignent d’un affaiblissement silencieux de la solidarité internationale. Le discours de la responsabilité partagée demeure, mais l’ossature financière qui le soutenait s’effrite.[CD2]
Cette tension se manifeste avec une acuité particulière en Afrique - continent toujours au cœur des trois pandémies, mais aussi premier exposé aux conséquences du désengagement mondial. Une forme nouvelle d’« austérité sanitaire » s’installe : double étau entre retrait des bailleurs et sous-investissement chronique des gouvernements africains[CD3] . Il en résulte un paradoxe de dépendance, pris entre fatigue extérieure et inertie intérieure.
Pourtant, au sein même de cette crise, une bifurcation apparaît. Une transition, discrète mais réelle, s’esquisse : passer de la survie à la souveraineté. La décision du Fonds mondial d’intégrer progressivement ses financements dans les systèmes nationaux de gestion des finances publiques - comme l’a illustré la rencontre de Dakar - ouvre la voie à un nouveau pacte[CD4] . Bien menée, cette intégration peut renforcer les institutions, consolider la confiance, et ancrer durablement le financement de la santé dans les structures nationales. Mal conduite, elle pourrait au contraire reproduire les asymétries et marginaliser les communautés qui ont porté l’essentiel de la riposte.
La même logique prévaut pour la collaboration accrue avec les institutions supérieures de contrôle[CD5] . Sortir des audits parallèles onéreux pour s’appuyer sur des mécanismes publics pérennes n’est pas qu’un geste technique : c’est une affirmation de souveraineté et de dignité. La transparence ne doit plus être importée - elle doit être institutionnalisée.
Mais un autre mouvement, plus géopolitique, redessine le paysage. La nouvelle stratégie américaine de santé mondiale - pragmatique, transactionnelle et axée sur la sécurité - reconfigure les termes de la coopération[CD6] . En liant l’aide aux intérêts nationaux et en privilégiant les accords bilatéraux, elle fragilise l’idéal multilatéral qui a permis la naissance du Fonds mondial. L’efficacité pourrait y gagner, l’équité pourrait s’y perdre.
Johannesburg n’a donc pas été un échec : ce fut un miroir. Le reflet d’un monde en transition, où la grammaire morale de l’aide est en train de se réécrire. Le défi n’est plus seulement de combler un déficit, mais de restaurer une cohérence : articuler réalisme et solidarité, souveraineté et interdépendance, efficacité et justice.
Le Fonds mondial se retrouve une nouvelle fois à un carrefour. Il peut gérer le déclin - ou impulser le renouveau. Ce choix déterminera non seulement la prochaine reconstitution, mais aussi la signification future de la santé mondiale.
Comme toujours, Aidspan et son équipe de rédaction, sous la direction d'Ida Hakizinka, font de leur mieux pour assurer l'exactitude des données et des déclarations dans nos articles publiés - et donc l'inclusion d'hyperliens - mais si vous, le lecteur, identifiez une erreur ou une omission importante, veuillez-nous en informer et nous fournir la source de vos données ; nous serons heureux de publier une correction ou un amendement.
Si vous appréciez l’OFM et le trouvez pertinent pour votre travail, veuillez encourager vos collègues et ami(e)s à s'abonner.
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