Le 17 septembre 2025, plus de 360 acteurs de la santé, responsables communautaires et représentants de la société civile du monde entier ont participé à une réunion virtuelle pour discuter de l'avenir du Plan d'urgence du Président des États-Unis pour la lutte contre le sida (PEPFAR). Cette réunion faisait suite à la publication de documents du gouvernement américain détaillant des modifications importantes apportées au programme. Ces documents décrivent une procédure de « planification transitoire » pour les activités du PEPFAR d'octobre 2025 à mars 2026. Bien que conçue comme une solution à court terme, cette procédure inquiète les militants, qui craignent qu'elle ne compromette les succès obtenus jusqu'à présent par le PEPFAR, ne réduise la transparence et n'éloigne le programme des communautés qu'il soutient, risquant ainsi de compromettre les progrès réalisés dans la lutte contre le VIH au cours des deux dernières décennies.
Le plan Bridge : un changement de direction
Le document de trois pages intitulé « Plan de transition PEPFAR pour l’exercice 2026 » a suscité de vives inquiétudes. Voici ses principaux points :
Rapports de pays : Un manque de consultation
La réunion a permis aux participants de plusieurs pays d'échanger leurs expériences. Un constat récurrent s'est dégagé : les communautés et les organisations de la société civile n'ont pas été suffisamment impliquées dans le processus de planification.
Les rapports mettent en évidence un décalage entre les décisions prises à Washington et les expériences concrètes des organisations locales dans le cadre du PEPFAR.
L'effet sur les populations clés
L'absence de programmes spécialisés pour ces populations constitue un problème majeur. Ces groupes, souvent marginalisés ou criminalisés, ont joué un rôle central dans les initiatives de prévention du PEPFAR. Beaucoup craignent que, sans initiatives ciblées, les progrès réalisés ne soient anéantis.
Un délégué du Consortium des populations clés au Kenya a déclaré que la dérogation régissant le plan de transition garantissait la continuité des soins, mais négligeait les efforts de prévention. « Nos initiatives sont principalement axées sur la prévention », a-t-il affirmé. « La plupart de nos activités ne peuvent se dérouler sans ces services. » Parmi ces services destinés aux populations à risque, on compte les réseaux d'éducateurs pairs, les centres d'accueil et les modèles de prestation de services communautaires qui offrent des soins médicaux et des espaces sécurisés permettant de réduire la stigmatisation et la discrimination.
Maureen Milanga, directrice des politiques et du plaidoyer chez Black Gay Men Connect (BGMC), a déclaré que, dans de nombreux pays, des groupes communautaires avaient déjà élaboré des plans détaillés pour fournir des services complets aux populations clés. « Actuellement, ces plans ne peuvent être mis en œuvre faute d'infrastructures et de financements pour les programmes destinés aux populations essentielles », a-t-elle affirmé.
Les défenseurs de la santé ont averti que les lacunes en matière de prévention entraîneraient de nouvelles infections au sein des populations les plus vulnérables, mettant ainsi en péril des années de progrès.
Une dimension politique
Au-delà des détails techniques, le Bridge Plan met en lumière des discussions politiques plus profondes sur l'avenir du leadership américain dans le domaine de la santé mondiale.
Le document établit un lien entre les allocations budgétaires et la proposition de budget du président pour l'exercice 2026, qui prévoyait de réduire le financement du PEPFAR à 2,9 milliards de dollars, soit une baisse de 40 % par rapport aux 4,85 milliards de dollars alloués par le Congrès l'année précédente.
Les défenseurs de cette mesure affirment qu'elle crée des tensions entre le pouvoir exécutif et le Congrès. Asia Russell, directrice générale de Health GAP, a souligné que c'est au Congrès, et non au président, de décider des niveaux de financement. Elle a fait valoir que, en synchronisant le plan avec la proposition de budget de l'administration, la procédure compromet le contrôle du Congrès.
Ce contexte politique a accru l'incertitude. La couverture médiatique met en lumière des cas où l'administration a retardé ou retenu des fonds approuvés par le Congrès, ce qui amène les critiques à affirmer que ces actions nuisent à la stabilité et érodent la confiance du public.
Stratégies de la société civile
Malgré les inquiétudes, les participants à la réunion se sont concentrés sur des approches positives pour préserver les services essentiels et défendre les principes fondamentaux du PEPFAR.
Préserver l'héritage du PEPFAR
La réunion s'est conclue sur une note d'urgence et d'unité. Près de 400 personnes sont restées jusqu'à la fin des 90 minutes, témoignant de leur vive inquiétude. Les modérateurs l'ont qualifiée de « conversation en famille », soulignant l'engagement commun à préserver les acquis du PEPFAR.
Pour beaucoup, l'impact dépasse le stade de la planification. Le PEPFAR est considéré comme un modèle de leadership américain grâce à ses partenariats solides et à l'utilisation des données, mais des inquiétudes subsistent quant au fait que le nouveau Plan de transition compromette l'inclusion et la participation communautaire.
Perspectives d'avenir
Alors que la date limite du 24 septembre pour le dépôt des plans nationaux approche, les défenseurs des droits des personnes vulnérables ont promis de poursuivre leurs efforts. Ils souhaitent que le processus reste ouvert, encourage un véritable dialogue et protège les services destinés aux plus démunis.
Le débat sur l'avenir du PEPFAR illustre également les défis majeurs auxquels est confrontée la santé mondiale aujourd'hui : la politique, le financement et la protection des programmes destinés aux personnes qui en ont le plus besoin.
On saura bientôt si le Plan de transition n'est qu'une solution temporaire ou le point de départ d'un changement durable. Pour les personnes vivant avec le VIH ou à risque de le contracter, il ne s'agit pas seulement d'une question politique : leur santé et leur bien-être général en sont directement affectés.
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