En 2021, le Programme commun des Nations Unies sur le VIH-sida (ONUSIDA) a mis en place un modèle innovant d’assistance technique en vue d’aider les pays à préparer leurs demandes pour la deuxième phase du dispositif de riposte au COVID-19 (C19RM). Ce modèle comprenait un soutien dans le pays à l’élaboration des propositions, un mécanisme d’assistance virtuelle et des examens virtuels par les pairs des projets de demandes de financement, ainsi qu’un service d’assistance offrant sur demande aux pays un soutien technique personnalisé. Lors de la conception du modèle d’assistance technique, l’ONUSIDA a tenu compte des leçons tirées de l’assistance apportée aux pays pour la préparation de leurs demandes de financement 2020-2022 au Fonds mondial et des premières demandes de financement C19RM de 2020. Le soutien technique virtuel avait pour principal objectif i) d’accorder davantage d’attention aux questions liées aux communautés, aux droits humains et au genre (CDG) et ii) d’atténuer l’impact de la COVID-19 sur les programmes de lutte contre le VIH et d’élaborer des interventions visant à remettre les programmes de lutte contre le VIH sur la bonne voie, voire d’élargir leur portée, adaptée au contexte de la pandémie dans chaque pays. Cependant, un soutien était également disponible pour d’autres aspects de l’élaboration des demandes de financement, notamment l’atténuation de l’impact sur les programmes de lutte contre la tuberculose et le paludisme, ainsi que pour des domaines liés au renforcement des systèmes de santé. Cet article, qui fait partie d’une série d’articles sur les expériences des pays dans le cadre de l’élaboration de leurs demandes de financement C19RM, l’appui à l’élaboration des propositions et la mise en œuvre des subventions, décrit l’assistance virtuelle C19RM lancée en mai 2021 par le mécanisme de soutien technique de l’ONUSIDA, qui est financé par une subvention de l’Agence des États-Unis pour le développement international au travers du Bureau du coordonnateur de la lutte contre le sida dans le monde. Dans l’article suivant de cette série, nous examinerons le succès de cette approche et les leçons tirées en vue d’aider les pays présentant une demande au cours de la période 6, en septembre 2021, et au-delà. Un autre article étudiera les implications en termes d’assistance technique à l’ère de la COVID-19. Riposte du Fonds mondial à la COVID-19 Depuis début 2020, de nombreux programmes de lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme connaissent d’importantes perturbations liées à la COVID-19 et aux mesures de santé publique qu’elle impose, aux difficultés de la chaîne d’approvisionnement, aux obstacles empêchant les patients de se rendre dans les services de santé et à l’impact de la pandémie sur les systèmes de santé. Dans de nombreux pays, la riposte nationale à la COVID-19 a eu une incidence négative sur les programmes de prévention du VIH, en particulier pour les populations clés et vulnérables, ainsi que pour les adolescentes et les jeunes femmes et leurs partenaires. Les services de soins prénatals, de dépistage du VIH et de diagnostic précoce des nourrissons ont notamment été affectés, de même que le démarrage et l’observance du traitement. La pandémie a également mis en lumière le rôle central des communautés, des organisations communautaires et des agents de santé communautaires dans la riposte. Un autre effet important, qui est devenu apparent dès les premiers temps de la pandémie, en 2020, est l’augmentation significative de la violence fondée sur le genre et des violations des droits humains, notamment des cas de stigmatisation et de discrimination. En 2020, en réponse à la pandémie, le Fonds mondial a instauré des assouplissements des subventions ainsi qu’un dispositif de riposte à la COVID-19 (C19RM) pour aider les pays à lutter contre la COVID-19, à atténuer son impact sur les programmes vitaux de lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme, garantir la disponibilité de produits de santé critiques pour faire face aux maladies prioritaires, et éviter que les systèmes de santé fragiles ne soient submergés. À ce jour, le Fonds mondial a décaissé plus de 759 millions de dollars. En 2021, le Fonds mondial a mobilisé près de 3,7 milliards de dollars supplémentaires pour la lutte contre la COVID-19, grâce, en particulier, à un fonds d’urgence doté de 3,5 milliards de dollars mis à disposition par le gouvernement des États-Unis et à une contribution de 140 millions d’euros du gouvernement allemand. Ces fonds additionnels ont permis au Fonds mondial d’accélérer sa riposte à la pandémie et de maintenir son soutien en 2021 au travers du C19RM. Allouer des fonds supplémentaires pour remédier aux perturbations des programmes Dans le cadre du C19RM 2021, le Fonds mondial met davantage l’accent sur le renforcement de la participation des partenaires et des communautés. Les interventions admissibles comprennent 1) les actions visant à renforcer la riposte des pays à la COVID-19, 2) l’adaptation des programmes de lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme dans le contexte de la COVID-19 et 3) le renforcement des systèmes de santé et des systèmes communautaires. Le Fonds mondial a également souligné que ces trois domaines « devraient aussi inclure des activités transversales qui renforcent les ripostes communautaires à la COVID-19 ». Tous les pays qui reçoivent actuellement des financements du Fonds mondial, notamment les bénéficiaires régionaux et multipays, peuvent avoir droit à un financement C19RM en plus de leur allocation 2020-2022. Les allocations se font au travers d’une allocation de base et/ou d’une allocation au-delà de la somme de base L’allocation de base représente un montant équivalent à 15 % de la somme que, en principe, tous les pays peuvent s’attendre à se voir allouer pour 2020-2022 s’ils présentent des demandes de financement de qualité. L’allocation au-delà de la somme de base permet aux pays d’accéder à des fonds supplémentaires – selon les orientations initiales, il peut s’agir d’un montant supplémentaire équivalent à 15 % de la somme allouée au pays pour 2020-2022, mais le montant final peut être supérieur ou inférieur – pour les besoins prioritaires des programmes. Pour autant qu’ils présentent des demandes de qualité, ambitieuses et hiérarchisées, en principe, tous les pays peuvent s’attendre à recevoir un financement au-delà de la somme de base. Le montant de l’allocation au-delà de la somme de base tient compte de facteurs d’ajustement, dont les suivants :

• la charge de morbidité de la COVID-19 dans le pays ;
• l’ampleur des perturbations des services des programmes soutenus par le Fonds mondial ;
• le montant des financements C19RM décaissés antérieurement et les progrès de la mise en œuvre de ces fonds ;
• la disponibilité de financements provenant d’autres sources.

Les candidats peuvent solliciter un financement au moyen d’une demande de financement complète et, éventuellement, d’une demande de financement accélérée. Les pays admissibles ont été invités à présenter leur demande de financement C19RM complète au cours de quatre périodes de présentation en mai et juin 2021, et à présenter une demande accélérée à partir d’avril 2021. Le Fonds mondial a ensuite annoncé deux périodes supplémentaires de présentation des demandes de financement en juillet et septembre. Les approches à adopter et les documents nécessaires pour la préparation des demandes de financement C19RM complètes sont très semblables à ceux des demandes ordinaires du Fonds mondial portant sur le VIH, la tuberculose et le paludisme et sur les systèmes résistants et pérennes pour la santé. Il s’agit notamment de garantir la participation significative des parties prenantes (en particulier de la société civile et des populations clés et vulnérables) et de présenter le formulaire de demande de financement et les annexes requises, telles que le paysage de financement et le budget détaillé. Tous les documents doivent en outre être approuvés par l’instance de coordination nationale. Il y a toutefois fois également certains aspects nouveaux. Conformément aux lignes directrices de l’Organisation mondiale de la Santé relatives au plan stratégique de préparation et de riposte à la COVID-19 pour 2021, les pays sont censés avoir élaboré leur propre plan national de préparation et de riposte, et les activités proposées doivent donc également être en phase avec les principaux éléments du plan. Outre la présentation du plan national de préparation et de riposte à la COVID-19, les autres différences sont notamment l’approbation de la demande de financement C19RM par l’organisme national chargé de coordonner la riposte à la COVID-19 et par l’instance de coordination nationale, ainsi que l’introduction d’un nouveau cadre modulaire. Par ailleurs, il n’est pas nécessaire d’inclure les tableaux des lacunes programmatiques ni le cadre de résultats dans les demandes de financement C19RM, et les demandes sont envoyées au Comité chargé des investissements C19RM plutôt qu’au Comité technique d’examen des propositions. Un autre facteur important a une incidence sur l’élaboration et la présentation des demandes de financement C19RM. Le délai entre la réception de la lettre d’allocation et la présentation de la proposition est de quatre à huit semaines. Soutien technique C19RM de l’ONUSIDA En 2020 et début 2021, le mécanisme de soutien technique de l’ONUSIDA avait fourni un soutien important aux pays qui préparaient leur demande de financement 2020-2022 au Fonds mondial, et avait aussi déjà aidé plusieurs pays à préparer leur première demande de financement C19RM. Le modèle de soutien virtuel C19RM 2021 reposait donc sur les expériences et les leçons tirées dans le contexte des propositions au Fonds mondial élaborées selon le nouveau modèle de financement et sur les premières expériences lors de la première phase du C19RM. Durant la même période, le mécanisme de soutien technique a également appuyé des missions techniques d’atténuation de l’impact, d’adaptation et de mise à l’échelle dans le contexte du VIH. Certaines de ces missions étaient liées à la COVID-19 (information sur l’impact et les ripostes, modèles innovants, soutien aux équipes nationales et aux ripostes communautaires, notamment) ou étaient partiellement axées sur la COVID-19 (par ex. plan d’accès aux services, innovations en matière de prévention combinée, protection sociale). L’ONUSIDA a également appuyé des missions sans lien avec la COVID-19, telles que l’amélioration de la résilience et de la reprise des ripostes nationales au VIH dans le contexte de la COVID-19 (par ex. prestation de services VIH différenciés, ripostes communautaires et suivi communautaire, et autres innovations). En 2021, le mécanisme de soutien technique a fourni une assistance virtuelle à quatre demandes de financement C19RM (Botswana, El Salvador, Kenya et Zimbabwe) et à un pays (Cap-Vert). Mécanisme d’assistance virtuelle C19RM de l’ONUSIDA L’ONUSIDA et ses partenaires dans le cadre du mécanisme de soutien technique (Oxford Policy Management et Genesis Analytics) ont établi un mécanisme de soutien en ligne pour les pays préparant leur demande de financement C19RM 2021 complète au Fonds mondial. Le soutien apporté est virtuel, non seulement en raison des restrictions en matière de voyage liées à la COVID-19, mais également parce que celles-ci ont mené à de nouvelles manières de travailler par l’intermédiaire de mécanismes en ligne, qui permettent également des économies et une efficacité accrue. L’objectif consiste à aider les pays à accéder à des financements supplémentaires du Fonds mondial et à présenter des demandes de financement de qualité, axées sur l’atténuation de l’impact sur le VIH et une plus grande attention aux questions liées aux communautés, aux droits et au genre. Ce mécanisme de soutien virtuel est illustré à la Figure 1.

Figure 1. Service d’assistance virtuelle pour les demandes de financement C19RM V 2.0, particulièrement axé sur l’atténuation de l’impact sur la lutte contre le VIH et les systèmes communautaires

Le mécanisme comporte trois éléments : i) examens à distance par les pairs des demandes de financement et éclaircissements techniques (service d’assistance), ii) établissement d’une communauté de pratique et iii) organisation de consultations virtuelles sur des sujets en lien avec l’élaboration des propositions C19RM. La communauté de pratique virtuelle est présentée dans la Figure 2 ci-après ; chaque hexagone autour de la communauté illustre un des nombreux éléments de la candidature pouvant faire l’objet d’une assistance technique.

Figure 2. Communauté de pratique virtuelle

Les pays pouvaient recevoir un soutien virtuel de spécialistes en matière de VIH, de COVID-19, de questions liées aux communautés, aux droits et au genre ou encore de système de santé communautaires. Ces spécialistes pouvaient réaliser des examens documentaires virtuels des projets de demande de financement C19RM ou donner des éclaircissements sur des questions techniques. Les consultants et les personnes chargées de la rédaction des propositions pouvaient consulter et partager les directives les plus récentes ainsi que des exemples d’adaptation en lien avec la COVID-19 et des considérations liées aux droits humains et à l’égalité entre les sexes. Les personnes intéressées pouvaient également participer aux consultations virtuelles (webinaires) régulièrement organisées sur des sujets spécifiques tels que les CDG, la violence fondée sur le genre, l’atténuation de l’impact sur la lutte contre le VIH, la prévention et la prestation de services au moyen d’innovations virtuelles. Soutien technique virtuel C19RM fourni à ce jour par l’ONUSIDA Dans une démarche semblable aux examens réalisés pour les demandes de financement au Fonds mondial l’an dernier, des examens documentaires des projets de demande de financement C19RM rédigés en anglais ou en français ont été réalisés à distance par une équipe de consultants et de spécialistes de l’ONUSIDA. Au total, 17 projets de demande de financement ont été soumis en vue d’un examen par les pairs, dont quatre ont été présentés pour un second examen. Il s’agissait des candidatures du Botswana, du Congo, de la Côte d’Ivoire, de la Gambie, du Kenya, du Libéria, de Madagascar, de la Namibie, du Nigeria, de l’Ouganda, de la République centrafricaine, du Sénégal, de la Tanzanie, du Tchad, de la Zambie, de Zanzibar et du Zimbabwe. Les allocations de base correspondantes s’élèvent à un peu plus de 624 millions de dollars. De nombreuses entités, parmi lesquelles des instances de coordination nationale, des équipes de rédaction, des consultants, des communautés et des bureaux de pays de l’ONUSIDA, ont fait appel au service d’assistance virtuelle pour obtenir des réponses à des questions techniques ou demander des conseils sur tous les aspects du formulaire de demande de financement, du budget détaillé, de la quantification des produits de santé et des autres annexes clés. Un site Web a été mis en place pour la communauté de pratique virtuelle, lequel a été enrichi d’un référentiel d’informations contextuelles que toute partie intéressée peut consulter et partager, contenant notamment les lignes directrices et les notes techniques les plus récentes, des exemples d’adaptation des services VIH face à la COVID-19, des expériences de pays, des outils transversaux et des rapports thématiques sur des questions liées aux droits humains et au genre. Des consultations virtuelles (Tableau 1) sont régulièrement organisées depuis mai 2021, couvrant les principaux sujets présentant un intérêt pour les pays, les prestataires d’assistance technique et les collaborateurs et les partenaires du Fonds mondial qui travaillent sur les demandes de financement C19RM. Ces consultations sont par ailleurs disponibles sous forme d’enregistrement. Conclusion On peut déduire de l’intérêt énorme – et grandissant – vis-à-vis des consultations virtuelles, ainsi que de la meilleure qualité des demandes de financement C19RM du fait des examens par les pairs et du soutien technique en ligne/virtuel, que le mécanisme de soutien virtuel de l’ONUSIDA a donné des résultats prometteurs. Le mécanisme de soutien virtuel demeurera actif jusqu’à fin septembre 2021, et il se peut qu’il soit prorogé au-delà de cette date si le Fonds mondial parvient à obtenir des fonds supplémentaires et instaure de nouvelles périodes de présentation des demandes de financement C19RM. Le troisième article de cette série abordera les leçons tirées de la première série de demandes de financement C19RM soumises à un examen par les pairs.