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OFM Edition 103,   Article Number: 1

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LES PAYS DEVRAIENT POUVOIR SORTIR DE LA POLITIQUE DE SAUVEGARDE ADDITIONNELLE DU FONDS MONDIAL

Cette politique contribue à la bonne gestion financière mais n'est pas la panacée

Article Type:
Opinion
     Author:
Djesika Amendah
     Date: 2020-09-25

ABSTRACT

RÉSUMÉ En plus de publier les principes et l'application de la politique de sauvegarde additionnelle, le Fonds mondial doit publier ses indicateurs de performance, y compris le renforcement des capacités requis, la stratégie de sortie et le délai dans lequel ces objectifs devraient être atteints. Le Secrétariat et le pays doivent s'entendre sur les exigences qui rendraient possible le retrait de la Politique de sauvegarde additionnelle, ainsi que sur les mesures qui empêcheraient la répétition des infractions.

Le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme accorde des subventions à plus de 100 pays. L'instance de coordination nationale (CCM en anglais), qui comprend des représentants de l'État, de la société civile, des populations clés et d'autres parties prenantes, sélectionne généralement les bénéficiaires principaux (BP) pour administrer ces subventions. Les BP sont des agents de mise en œuvre et sont des institutions étatiques comme le ministère de la santé ou des acteurs non étatiques comme les organisations non gouvernementales. Ces BP doivent faire preuve d'une gestion financière satisfaisante et assurer la bonne exécution de ces programmes. Cependant, selon le manuel opérationnel du Fonds mondial, le Secrétariat peut invoquer la Politique de sauvegarde additionnelle (ASP) pour "traiter les problèmes matériels qui surviennent lorsque les responsables de la mise en œuvre des programmes (tels que les BP et les sous-bénéficiaires) ont démontré un manque de capacité ou une incapacité à déployer, mettre en œuvre et/ou sauvegarder efficacement le financement et les actifs des subventions du Fonds mondial en raison de facteurs (tels que des troubles civils, un afflux de personnes déplacées, l'instabilité gouvernementale et une capacité de programme national inadéquate) qui sont ou non sous le contrôle des responsables de la mise en œuvre existants dans un pays donné". Cette politique accorde notamment au Secrétariat du Fonds mondial le pouvoir de sélectionner les BP et, parfois, les sous-bénéficiaires de la subvention. Ces BP sont souvent des agences des Nations Unies (ONU) ou des organisations internationales non gouvernementales basées en Europe ou en Amérique.
La plupart du temps, l'ASP améliore la gestion financière de la subvention. Cependant, selon le Bureau de l'inspecteur général (BIG), il ne renforce souvent pas la chaîne d'approvisionnement. En d'autres termes, l'ASP est en mesure de prévenir le vol de fonds par le personnel, mais les produits des entrepôts ou des établissements de santé sont vulnérables au vol. Dans les pays où cette politique est appliquée, les entités gouvernementales et non étatiques sont souvent reléguées au rang de sous-bénéficiaires des agences internationales choisies par le Secrétariat. Les institutions locales sont toujours chargées de faire le travail sur le terrain, comme s'occuper des patients, distribuer les médicaments, atteindre les populations clés, mais les BP sont les décideurs officiels.

Les institutions internationales ne sont pas la panacée
Dans leur rôle de BP, les organisations internationales ne répondent pas toujours aux attentes du Secrétariat. En 2019, le BIG a documenté le détournement de fonds par Population Services International (PSI) en République démocratique du Congo. Il a également relevé des manquements dans la gestion des actifs par le Programme des Nations Unies pour le développement, le BP au Soudan. En 2020, le gouvernement népalais a accusé l'organisation internationale et le BP "Save the Children" de surestimer le nombre de personnes vivant avec le VIH dans le but de recevoir des ressources supplémentaires en leur nom. (Ces affirmations n'ont pas été vérifiées de manière indépendante par le Fonds mondial ou toute autre institution). Le BIG a également noté que la mise en place des mesures de sauvegarde a un coût élevé. Il a comparé cinq pays sous ASP, et calculé que 57 % des subventions étaient consacrées aux frais de personnel, aux frais de structure, aux coûts de planification et d'administration, ce qui ne laisse qu'une petite proportion pour les autres activités liées aux subventions. Les ASP rassurent souvent (mais pas toujours) sur la bonne gestion financière. Toutefois, ces mesures ne permettent pas aux pays de s'approprier les subventions du Fonds mondial. A l’inverse, elles entraînent l'indifférence, voire l'animosité de certaines parties prenantes à l'égard des subventions du Fonds mondial. Selon le BIG, ces BP internationaux n'obtiennent pas nécessairement de meilleures performances des programmes.

Partenariat et appropriation par les pays
Dans certains pays, le Secrétariat du Fonds mondial ou les ICN (CCM) ont des difficultés à obtenir des fonctionnaires qu'ils démontrent à temps les dépenses de cofinancement ou l'exemption fiscale, qui est nécessaire pour une bonne performance des subventions. Ces difficultés sont parfois dues aux mesures de sauvegarde, car seule une petite partie de la subvention, sous forme d'activités et de leur financement, est mise en oeuvre dans le pays. Les calculs utilisent des chiffres arrondis provenant de documents officiels et sont basés sur l'allocation totale et non sur les dépenses. Or, la plus grande proportion des subventions, au moins 60 %, est utilisée pour acheter des produits de santé, comme les médicaments antirétroviraux (ARV), les moustiquaires ou d'autres intrants médicaux par le biais du mécanisme de mise en commun des achats (PPM) contrôlé par le Secrétariat et qui ne verse pas les sommes correspondant à ces achats aux pays. Les sièges des organisations internationales reçoivent 7 % de la subvention au titre des coûts indirects, ce qui laisse environ 33 % de l'allocation pour toutes les autres activités dans les pays. Les ressources humaines et les autres coûts opérationnels des organisations internationales absorbent environ 40 % du montant restant de l'allocation qu'elles gèrent, ce qui correspond à 12,5 % (33 %*40 %). En conclusion, les pays ne reçoivent plus qu'environ 20,5 % de l'allocation pour d'autres activités telles que la prévention, la sensibilisation pour mettre les gens en contact avec les soins, et le traitement et les soins des personnes vivant avec le VIH ou touchées par la tuberculose ou le paludisme. Ce pourcentage baisse encore si une part plus importante de la subvention est consacrée aux produits de base ou si d'autres contractants, tels que les agents fiscaux, fiduciaires ou de passation de marchés, travaillent également sur les subventions. Il est indéniable que la valeur des produits de santé pour les trois maladies ou 20,5% d'une allocation qui est une subvention (et non un prêt) est claire. Toutefois, de nombreux fonctionnaires estiment que cette somme est bien moins importante que l'allocation annoncée par le Secrétariat. Il est donc difficile de les convaincre de l'importance de la contribution du Fonds mondial et de la nécessité pour le pays de "s'approprier" ces programmes alors qu'il ne les gère pas.

Sortie des mesures de sauvegarde additionnelle
L'appplication de l'ASP doit s'accompagner d'une stratégie de sortie claire liée à un calendrier. Plusieurs rapports du BIG l'ont déjà recommandé : parmi eux, l'audit de 2017 sur la gestion des subventions dans les environnements à risque élevé et la revue consultative des subventions en Afrique occidentale et centrale. Aidspan défend l’idée que cette politique devrait être assortie d'un délai et être levée progressivement. À la fin du cycle au cours duquel l'ASP a été invoquée, et pour autant que les conditions soient remplies, le Secrétariat devrait permettre aux pays de choisir leur BP selon un ensemble de critères prédéterminés. Les deux parties peuvent convenir d'un mécanisme de renforcement des capacités, d'autres mesures d'atténuation des risques telles que l'instauration d'agents fiscaux et fiduciaires, ainsi que de contrôles plus fréquents et plus détaillés des agents locaux du fonds. Avec le temp, ces pays acquerront l'expertise nécessaire pour gérer plus efficacement leurs subventions. A l’heure actuelle, les BP internationaux, les agents fiscaux et fiduciaires renforcent rarement les capacités du personnel ou des institutions locales. Le Secrétariat crée un conflit d'intérêts intrinsèque lorsqu'il engage des institutions en tant que BP, agents fiscaux ou fiduciaires pour atténuer les risques et renforcer les capacités des personnes et des autres institutions qui prendront plus tard la relève. La composante de renforcement des capacités est alors négligée. La décision initiale du Conseil d'administration adoptant l'ASP en 2004 précisait que ces politiques devaient être appliquées tout au long de la subvention, et non pas indéfiniment, ce qui semble être l'interprétation actuelle du Secrétariat (Aidspan n'a trouvé aucun amendement à la décision initiale du Conseil). Le Fonds mondial a fait preuve d'innovation en instituant les ICN qui donnent aux populations clés une voix, même dans les pays où leurs activités sont criminalisées. Le Secrétariat devrait suivre le même principe d'inclusion et de dialogue lorsqu'il travaille avec des institutions nationales, étatiques et non étatiques qui, avec le temps, devraient être habilitées à gérer les subventions de leur pays. Selon le rapport du BIG sur les pays à haut risque, certains pays sont sous l'égide de l'ASP depuis plus d'une décennie. Certes, certains de ces pays sont en guerre et il est difficile et risqué d'y travailler ; mais tous les pays relevant de l'ASP ne sont pas en guerre. Malgré leurs défauts, la plupart de ces gouvernements gèrent leur pays et le rendent suffisamment accueillants pour que le personnel des organisations internationales puisse y vivre et y travailler. Aidspan a assisté à des réunions où des membres des ICN et des fonctionnaires ont déclaré publiquement que les mesures de sauvegarde additionnelles étaient pires que des peines de prison car, contrairement aux condamnés, ils ne connaissaient pas la durée de leur peine ni les conditions de libération anticipée le cas échéant. Dans le cas des mesures de sauvegarde, la durée de la peine est inconnue. Certains pays ont déclaré que même lorsque les conditions de retrait ont été remplies, le Secrétariat hésite à lever l'ASP. Les subventions du Fonds mondial au Nigeria ont récemment fait la une de l'actualité en raison de la sélection par le Secrétariat d'une organisation internationale autre que l'organisation locale préférée par l’ICN nigérian. Le pays est sous ASP, ce qui rend une telle décision possible. La société civile nigériane et le CCM ont réagi fortement à cette décision et ont porté le débat à l'attention des médias et du Conseil d'administration. Une telle exposition du Fonds mondial et le risque réputationnel y afférant auraient pu être évités s'il y avait eu une stratégie de sortie claire avec un délai recommandé que les deux parties suivraient. Par souci de transparence, qui est l'un des principes du Fonds mondial, ce dernier doit publier non seulement les raisons de l’application de cette politique dans un pays (comme il le fait actuellement), mais aussi la stratégie de sortie, ses indicateurs de performance et la période pendant laquelle elle s'appliquera. Le Secrétariat et le pays doivent également s'entendre sur les mesures qui permettront de lever l'ASP et d'éviter la répétition des problèmes de détournement et de fraude qui ont conduit à l'application initiale des mesures de sauvegarde.

Ressources complémentaires
Décisions du Conseil d’administration: Additional Safeguard Policy (GF/B7/7) 2004 Rapport d’audit: Gestion des subventions du Fonds mondial dans les environnements à risque élevé (GF-OIG-17-002) janvier 2017 Geneva, Switzerland Rapport d’audit: Subventions du Fonds mondial en République du Soudan (GF-OIG-19-010) - 29 Avril 2019)

Publication Date: 2020-09-25


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