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Subventions du Fonds mondial en République du Niger: Les principaux récipiendaires non gouvernementaux se montrent plus aptes à la mise en œuvre
OFM Edition 151

Subventions du Fonds mondial en République du Niger: Les principaux récipiendaires non gouvernementaux se montrent plus aptes à la mise en œuvre

Author:

Oliver Campbell White

Article Type:
ANALYSE

Article Number: 6

Le rapport d'audit du Bureau de l'Inspecteur général sur les subventions du Fonds mondial au Niger fait état de bonnes performances en ce qui concerne le programme de lutte contre le paludisme géré par les organisations caritatives et d'une meilleure disponibilité des principaux produits de santé. En revanche, les progrès sont limités pour ce qui est de l'amélioration de la qualité des soins et de la communication des données relatives au VIH. Par ailleurs, les faibles taux d'absorption des subventions pour le VIH et la tuberculose suggèrent que les activités financées ne sont pas mises en œuvre, ou alors, qu’elles ne le sont que partiellement. Des efforts supplémentaires sont apparemment nécessaires pour améliorer le taux d'absorption des subventions.

Le 28 mars 2023, le Bureau de l’inspecteur général (BIG) a publié son rapport sur les subventions du Fonds mondial au Niger qui couvre les principaux récipiendaires (PR) et les sous-récipiendaires des programmes bénéficiant de l’appui du Fonds mondial pour les subventions NFM2 et NFM3 de janvier 2019 à juin 2022 (voir le tableau A), à l’exclusion du diagnostic et du traitement de la tuberculose:

 

Tableau A: Principaux récipiendaires et sous-récipiendaires des subventions du Fonds mondial

 Composante maladie

Principaux récipiendaires

Sous-récipiendaires

Société civile

 Secteur public

VIH/SIDA

Ministère de la santé publique, de la population et des affaires sociales

PLAN Niger

ONEN

RENIP+

SONGES

Programme national de lutte contre le sida et les hépatites (PLNSH)

Tuberculose

Ministère de la santé publique, de la population et des affaires sociales

PLAN Niger

ONEN

Programme national de lutte contre la tuberculose (PNLT)

Paludisme

Catholic Relief Services (CRS) – Conférence des évêques catholiques des États-Unis (CRS (Niger)

Aucun

Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP)

Le Fonds mondial a classé le Niger dans la catégorie des contextes d’intervention difficiles (CID) depuis 2016 en raison de l’instabilité de sa situation politique et sécuritaire. Le pays est également soumis à la politique de sauvegarde additionnelle depuis 10 ans (voir notre article sur la PSA ici).

 

À titre d’information, le rapport indique que: (i) plus de 4,4 millions de personnes se sont retrouvées en situation d’insécurité alimentaire aiguë au cours de l’année 2022, soit plus de 17% de la population; et environ 6,8 millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire chronique; (ii) malgré une croissance constante de son produit intérieur brut (PIB) depuis 2000, la contribution du PIB à la santé est relativement faible (6% en 2019); et (iii) le pays connaît une pénurie de personnel de santé avec 0,04 médecin pour 1 000 habitants alors que la norme de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est d’un médecin pour 1 000 habitants.

En septembre 2022, les subventions actives s’élevaient à 153,50 millions d’euros, dont 58 % ont été décaissés pour la période d’allocation des fonds allant de 2021 à 2024:


 Note: La subvention NFM3 pour la tuberculose a démarré en 2022, par conséquent, le montant indiqué correspond à une année de mise en œuvre; les décaissements pour le VIH et le paludisme correspondent à deux années du NFM3.

 

 

Le rapport fournit le tableau suivant (tableau B) sur la charge de morbidité jusqu’en fin 2021:

 

Tableau B: Charge de morbidité au Niger, fin 2021

VIH / SIDA

Tuberculose

Paludisme

30 000 personnes vivaient avec le VIH en 2021, dont 81 % connaissaient leur statut et suivaient un traitement.

Les nouvelles infections annuelles ont diminué de 17 %, passant de 1 200 en 2010 à 1 000 en 2021.

Les décès liés au sida ont diminué de 54 %, passant de 2 200 en 2010 à 1 000 en 2021.

Seuls 40 % des femmes enceintes séropositives ont reçu des ARV en 2021.

Sur les 20 136 cas estimés de tuberculose, seuls 64 % ont été notifiés.

L’incidence de la tuberculose a diminué depuis 2010, passant de 191 à 79 pour 100 000 personnes en 2021.

Le taux de mortalité a diminué depuis 2010, passant de 58 à 13 pour 100 000 en 2021.

Le taux de réussite du traitement est resté proche de l’objectif de 90 % fixé par l’OMS (84 % des nouveaux cas de tuberculose dans la cohorte 2020).

Le paludisme est endémique dans l’ensemble du pays, avec un pic de transmission pendant la saison des pluies.

L’OMS a estimé à 8,2 millions le nombre de cas de paludisme en 2021 (contre 6,8 millions en 2010), avec 3,2 millions de cas traités par des ACT (contre 2,9 millions en 2018).

Le test de diagnostic rapide du paludisme constitue la principale méthode de confirmation, avec 5,6 millions de tests effectués en 2021, contre 1,6 million en 2011.

Le nombre estimé de décès liés au paludisme a légèrement diminué de 6 %, passant de 26 471 en 2010 à 24 997 en 2021.

 

Premier constat

Le premier constat est que la bonne performance des programmes de lutte contre le paludisme soutenus par le Fonds mondial au cours des 10 dernières années a permis de réduire la charge de morbidité du paludisme au Niger de manière considérable. Toutefois, pour assurer un meilleur impact des interventions au cours du prochain cycle de financement, il convient de mener une enquête sur la recrudescence des cas et des décès depuis 2017 et d’envisager des mesures adaptatives pour relever les défis identifiés dans le cadre de l’enquête.

 

Entre 2012 et 2021, l’incidence pour 1 000 habitants a baissé de 31 % et le taux de mortalité est passé de 4,8 % à 1,47 % au cours de la même période. Ces résultats reflètent une augmentation de la couverture en matière de prévention et de prise en charge des cas au fil du temps. Cependant, malgré ces progrès, les cas de paludisme confirmés et présumés ont augmenté de 70 % entre 2017 et 2021 (de 2,8 millions à 4,5 millions). Le nombre de cas de paludisme sévère a également connu une forte hausse de 150 % au cours de la même période, tandis que le nombre de décès a augmenté de 153 %. Il convient de noter que cette tendance à l’augmentation des cas de paludisme et des décès est commune à 10 des 11 pays à forte charge de morbidité et à fort impact pour le paludisme.

 

Pour inverser la tendance à l’augmentation du nombre de cas de paludisme et de décès, il est nécessaire d’en comprendre les causes profondes préalablement. C’est la raison pour laquelle le Comité technique d’examen des propositions (CTEP) a recommandé une analyse rétrospective afin d’étudier les causes profondes de cette recrudescence. L’enquête a été menée et a fait l’objet de discussions en décembre 2022. Ses résultats devraient être exploités pour éclairer les interventions du prochain cycle de financement.

 

Alors que la couverture des interventions clés est bonne, l’impact de l’intervention relative à la prévention à base de médicaments ne met pas en évidence une tendance à la baisse constante du nombre de cas de paludisme sévère chez les enfants de moins de cinq ans, qui a augmenté de 147 983 en 2019 à 189 067 en 2020, mais est ensuite descendu à 157 693 en 2021. En raison de l’amélioration de la qualité des données en 2020 et 2021, l’analyse rétrospective n’a pas pu tirer de conclusions pour la période antérieure à 2020.

 

À présent que l’analyse rétrospective est achevée, les informations sont utilisées par l’Instance de coordination nationale (ICN) et le PNLP pour éclairer les interventions du prochain cycle de financement; par conséquent, aucune autre action de gestion n’est jugée nécessaire pour l’instant.

 

Deuxième constat

L’amélioration de la qualité des soins et de la communication des données relatives au VIH a enregistré des progrès limités, et les problèmes liés aux interventions de lutte contre le VIH que le BIG a identifiés en 2018 n’ont toujours pas été résolus. Il s’agit notamment de données peu fiables sur les patients sous thérapie antirétrovirale (TAR), d’un taux élevé de patients perdus de vue, d’une faible couverture de la charge virale et d’une mauvaise cascade de prévention de la transmission mère-enfant (PTME). Des mesures d’atténuation sont prévues, mais leur mise en œuvre est lente.

 

Le BIG a identifié quatre problèmes à résoudre pour améliorer les résultats en matière de VIH:

  • Données non fiables concernant la cohorte de patients sous traitement antirétroviral.
  • Mécanisme de suivi inefficace pour repérer les patients séropositifs qui ont interrompu leur traitement.
  • Faible observance au traitement antirétroviral.
  • Faible couverture du contrôle de la charge virale. 

 

Des mesures correctives ont été prévues pour remédier à ces problèmes, en mettant l’accent sur les 26 cliniques de traitement antirétroviral les plus fréquentées, qui accueillent 80 % des patients. Toutefois, leur mise en œuvre a été retardée. Le BIG a noté que le matériel et l’équipement n’ont pas encore été livrés, alors que le délai convenu était le dernier trimestre de 2021. De même, la supervision prévue ainsi que les activités de suivi des patients perdus de vue n’ont pas encore démarré. Cette situation est principalement due à des retards dans les processus d’approvisionnement au sein du ministère de la Santé.

 

La cascade de la PTME reste faible, les observations du BIG étant similaires à celles formulées dans l’audit de 2018: (i) la couverture du dépistage pour la PTME est insuffisante; (ii) le lien entre le dépistage du VIH et le traitement reste en deçà des attentes; et (iii) la couverture du diagnostic précoce pour les nouveau-nés de mères séropositives est insuffisante. En raison de ces faibles performances, le taux de TME reste élevé (26 %). Un plan d’amélioration de la PTME a été élaboré et convenu avec le Fonds mondial en 2022, mais il n’a pas encore été mis en œuvre.

 

Bien que le taux de mortalité des patients co-infectés par la tuberculose et le VIH soit passé de 19 % en 2020 à 14 % en 2021, il reste insuffisant par rapport aux objectifs mondiaux. Environ 68 % des patients atteints de tuberculose et séropositifs ont été mis sous traitement antirétroviral alors que l’objectif fixé était de 98 % en 2021. Il n’existe actuellement aucun système de suivi du dépistage de la tuberculose chez les patients sous TARV. Ces difficultés reflètent une collaboration insuffisante entre le programme de lutte contre la tuberculose et celui du VIH, et la nécessité de renforcer la prise en charge de la co-infection tuberculose/VIH afin de réduire la mortalité.

 

Au regard des estimations actuelles de l’ONUSIDA concernant les populations clés (PC), la couverture des interventions de prévention et de dépistage (inférieure à 10 %) est trop faible pour avoir un impact significatif. En outre, les activités de prévention et de dépistage pour les personnes incarcérées ont démarré au cours du premier semestre 2022, mais les activités de sensibilisation n’ont couvert que 1 % de la population ciblée. Les causes profondes de cette faible couverture sont notamment le déficit de financement des activités de prévention, l’absence d’estimation précise de la taille des PC dans l’ensemble du pays, la normalisation tardive du dépistage du VIH hors de la capitale et le retard dans la mise en œuvre d’une approche différenciée du dépistage du VIH.

 

Troisième constat

Le renforcement de la capacité de distribution de la centrale des médicaments (ONPPC), avec notamment l’extension de sa flotte de camions de trois en 2018 à 15 en 2022, a permis à l’ONPPC de mettre en œuvre son plan de distribution pour approvisionner les entrepôts de district et les hôpitaux de référence nationaux/régionaux dans les délais impartis. En conséquence, à quelques exceptions près, les produits de santé essentiels pour les trois maladies sont disponibles en continu depuis 2021, tant au niveau central que dans les 16 établissements de santé visités. Il s’agit d’une réalisation importante qui témoigne de progrès significatifs par rapport à l’audit de 2018, lorsque le BIG avait constaté des ruptures de stock récurrentes de produits de santé pour les trois maladies.

 

Malgré les progrès remarquables en matière de disponibilité des médicaments, certains éléments clés de la chaîne d’approvisionnement doivent encore être améliorés.  Premièrement, le flux limité d’informations et la coordination insuffisante de la chaîne d’approvisionnement en produits contre le VIH ont conduit à des péremptions et à des pénuries.

 

Deuxièmement, la durabilité des investissements dans les entrepôts et la persistance de conditions de stockage inadéquates n’ont pas été suffisamment prises en compte. Bien que le BIG ait constaté une certaine amélioration des conditions de stockage, deux problèmes restent à résoudre: (1) les températures élevées dues à des systèmes de refroidissement non opérationnels; et (2) une gestion des stocks non optimale avec des données souvent obsolètes en raison de problèmes liés à l’absence de connectivité régulière à Internet.

 

À la fin du mois de septembre 2022, le Fonds mondial avait investi 1,08 million d’euros pour louer et rénover des entrepôts privés car les entrepôts de l’ONPCC n’étaient pas opérationnels malgré une tentative de rénovation au cours du cycle de financement précédent. Bien que le BIG ne remette pas en question l’approche actuelle d’investissement dans les entrepôts comme solution à court terme, cette approche ne soutient pas à long terme le renforcement du système de santé existant qui est faible. Des discussions sont en cours entre le Secrétariat du Fonds mondial et les parties prenantes dans le pays, mais le gouvernement n’a pas encore pris de décision quant à sa stratégie pour passer de la solution de stockage temporaire à une option plus durable, telle que l’acquisition d’un entrepôt appartenant au gouvernement. En outre, le Fonds mondial est en train de mettre en place un nouveau modèle de contrat pour permettre à l’ONPCC, qui est responsable de la gestion des entrepôts loués, de facturer les coûts engagés,

 

Le système d’information sur la gestion logistique (SIGL) reste dysfonctionnel, ce qui rend difficile la visibilité des niveaux de stock et de la consommation au niveau périphérique.  Malgré la formation et la distribution des outils du SIGL, la collecte des données auprès des établissements de santé reste inefficace en raison de multiples facteurs, notamment: (a) l’absence d’une équipe SIGL responsable au niveau central au sein de la Direction de la pharmacie et de la médecine traditionnelle pour coordonner et suivre la mise en œuvre du SIGL; (b) la non-utilisation du module de la plateforme en ligne pour la collecte d’informations logistiques; et (c) le manque de personnel.

 

Fourth Finding

The internal control system and the Global Fund’s assurance mechanisms for PRs are effective in preventing and detecting transaction and procurement irregularities. However, the low financial absorption of government grants has slowed down the implementation of grant activities.

 

Catholic Relief Services, the civil society PR, recorded financial absorption of 80% for malaria/C19RM from January 2021 to June 2022, whereas the government PR absorbed just 37% of allocated funds (HIV and RSSH interventions) during the same period. For the TB grant which started in January 2022, financial absorption was 24% in the first six months of implementation. The absorption of COVID-19 Resource Mechanism (C19RM) funds, including the HIV grant, was much lower at 5%. This low absorption suggests that grant activities experienced delays or were not implemented at all. The OIG saw evidence of this during the audit: (a) delayed implementation of the 26 HIV high volume sites project; (b) activities meant to strengthen the laboratory network were not implemented on a timely basis: (c) delayed implementation of HIV differentiated testing; and (d) the rehabilitation of three regional warehouses had not started, which would have improved drug storage conditions.

 

Quatrième constat

Le système de contrôle interne et les mécanismes d’assurance du Fonds mondial pour les PR sont efficaces pour prévenir et détecter les irrégularités dans les transactions et les achats. Toutefois, le faible taux d’absorption financière des subventions gouvernementales a ralenti la mise en œuvre des activités couvertes par les subventions.

 

Catholic Relief Services, le PR de la société civile, a enregistré un taux d’absorption financière de 80 % pour le paludisme/C19RM de janvier 2021 à juin 2022, alors que le PR gouvernemental n’a absorbé que 37 % des fonds alloués (interventions VIH et SSRP) au cours de la même période. Pour la subvention TB qui a démarré en janvier 2022, le taux d’absorption financière a été de 24% au cours des six premiers mois de mise en œuvre. L’absorption des fonds du mécanisme de riposte à la COVID-19 (C19RM), dont la subvention VIH, a été beaucoup plus faible, soit 5 %. Ce faible taux d’absorption suggère que les activités financées par les subventions ont subi des retards ou n’ont pas été mises en œuvre du tout. Le BIG a constaté des éléments suivants confirmant ces hypothèses au cours de l’audit: (a) retard dans la mise en œuvre du projet des 26 sites à forte fréquentation; (b) mise en œuvre tardive des activités destinées à renforcer le réseau de laboratoires; (c) retard dans la mise en œuvre du dépistage différencié du VIH; et (d) non démarrage de la réhabilitation de trois entrepôts régionaux, action qui aurait permis d’améliorer les conditions de stockage des médicaments.

 

Parmi les causes de ces retards, on peut citer:

  • La capacité insuffisante de l’unité de gestion des subventions du ministère de la Santé (UGS) à planifier, contrôler et coordonner la mise en œuvre de son plan de travail annuel qui a contribué au faible taux d’absorption. Le plan de travail qui n’est pas spécifique en ce qui concerne les échéances cibles et ne contient pas d’informations essentielles pour permettre un suivi adéquat. La coordination avec les responsables de mise en œuvre est également difficile en l’absence d’une définition des responsabilités et d’un cadre permettant d’identifier et d’éliminer les goulots d’étranglement en temps utile. Des retards importants ont été constatés dans l’acquisition de produits et de services non médicaux: 96 % et 63 % des achats prévus en 2022 et 2021 respectivement n’ont pas été effectués ou ne l’ont été que partiellement, pour une valeur de 5,6 millions d’euros. Le BIG a également constaté que les procédures d’achat s’étendaient jusqu’à 10 mois dans certains cas.
  • Les restrictions de déplacement liées à la Covid 19 ont empêché l’équipe pays de mieux évaluer les goulots d’étranglement de la mise en œuvre et d’identifier les mesures d’atténuation en temps utile. Par exemple, il a fallu près de 15 mois au Secrétariat pour proposer une solution au problème de la lenteur du décaissement des fonds aux sous-traitants qui constitue l’un des principaux facteurs contribuant à la faible absorption.
  • La validation des dépenses est un processus qui prend du temps et qui a une incidence sur l’absorption des fonds. Le BIG a constaté que 60 % des dépenses ou des demandes de paiement soumises chaque trimestre par l’UGS n’ont pas pu être approuvées par l’agent fiscal dès leur première soumission. Dans la plupart des cas, les pièces justificatives étaient incomplètes ou incohérentes, et les responsables de mise en œuvre prennent parfois jusqu’à deux mois pour y remédier et obtenir la validation du paiement. Au moment de l’audit, les parties concernées n’avaient proposé aucun plan de redressement.

 

Notations de l’audit

L’objectif général de l’audit était de fournir une assurance raisonnable en ce qui concerne l’adéquation, l’efficacité et l’efficience des subventions du Fonds mondial accordées à la République du Niger. L’évaluation des trois objectifs d’audit spécifiques se présente comme suit:

Tableau C: Objectifs et notations de l’audit

Objectif

Notation

Audit du dispositif de mise en œuvre existant au sein du ministère de la Santé, ainsi que la conception et la mise en œuvre des principales interventions programmatiques, en particulier: la qualité des services et le système de gestion de l’information sanitaire.

Nécessite une amélioration substantielle

Conception et mise en œuvre de mesures d’atténuation visant à garantir la disponibilité continue de produits de santé de qualité, l’efficacité et la redevabilité tout au long de la chaîne d’approvisionnement.

Partiellement effectif

Le système de gestion financière des organismes de mise en œuvre, ainsi qu’un mécanisme d’assurance visant à atténuer les risques financiers et fiduciaires et à permettre une mise en œuvre efficace des activités financées par les subventions.

Partiellement effectif

 

 

Actions convenues de la Direction

Les actions convenues de la Direction (AMA) pour les constats 2, 3 et 4 sont les suivantes:

  1. Le Secrétariat, en collaboration avec le ministère de la Santé et les partenaires, veillera à mettre en place, d’ici au 30 septembre 2024, les éléments suivants

(a)  La validation et le déploiement d’un registre de traitement antirétroviral permettant de suivre la cohorte de patients sous traitement antirétroviral, en particulier l’observance au traitement, le suivi des patients perdus de vie et de la rétention dans les soins, le schéma thérapeutique spécifique, etc. dans les sites de traitement antirétroviral à forte fréquentation représentant plus de 80 % de la cohorte; et 

(b)  Le renforcement des sites de PTME à forte charge de travail soutenus par l’initiative stratégique d’assistance technique afin de fournir des services de PTME de qualité par la mise en œuvre d’un ensemble d’interventions comprenant des formations de remise à niveau destinées aux prestataires de santé et aux points focaux PTME/VIH sur l’intégration de base des services de PTME dans la consultation prénatale et le mentorat des prestataires de santé par un groupe de mentors en PTME. 

  1. Le Secrétariat travaillera avec le ministère de la Santé, les partenaires et les responsables de mise en œuvre pour assurer d’ici le 30 juin 2024:

(a) la mise en place d’une Unité de Gestion Logistique (UGL) au sein de la Direction de la Pharmacie du Ministère de la santé (actuellement en cours de transfert vers une Agence de Régulation Pharmaceutique nouvellement créée), en vue de renforcer la gouvernance et la supervision du SIGL pour le suivi de la gestion des produits du programme de lutte contre le VIH; et

(b) la correction des lacunes identifiées dans les conditions de stockage et la gestion des stocks au niveau central. 

  1. Le Secrétariat travaillera avec les responsables de mise en œuvre pour définir, d’ici le 30 avril 2024, des indicateurs clés de performance (ICP) au niveau de l’UGS afin de suivre l’efficacité des procédures financières et des processus d’achat non liés à la santé.

 

Commentaire 

Ce rapport d’audit porte sur les subventions du Fonds mondial. Néanmoins, il aurait été utile de mentionner les budgets totaux des programmes de lutte contre la maladie ainsi que les contributions du gouvernement et de toute autre source. Le gouvernement a-t-il respecté ses engagements financiers? 

 

Dans le premier constat, concernant le paludisme, le rapport fait référence à la “hausse exponentielle des cas et des décès depuis 2017”. Cette affirmation semble quelque peu exagérée. Tout d’abord, des augmentations plus importantes du nombre de cas ont été enregistrées par le passé (en 2012, 2014 et 2016) – voir le tableau D ci-dessous. Deuxièmement, comme le montre le tableau, en 2021, le nombre de décès en pourcentage de la population était inférieur à celui de 2017. Compte tenu des perturbations du système de santé causées par la pandémie de COVID-19, les indicateurs du paludisme sont probablement meilleurs que ce à quoi on aurait pu s’attendre. Nous attendons avec impatience les résultats de l’analyse rétrospective.

 

Tableau D: Cas de paludisme au Niger en 2020-2021

Année

Cas suspects

Présumés et confirmés

Estimation du nombre de décès

Cas

% de la population

Nombre

% de la population

2010

11 231 308

4 231 896

25,42

26 471

0,159

2011

  5 315 184

4 401 099

25,46

28 225

0,163

2012

  7 818 305

6 398 943

35,64

28 977

0,161

2013

  5 584 223

4 333 905

23,23

28 864

0,155

2014

  7 100 212

5 247 235

27,07

27 969

0,144

2015

  4 671 411

3 937 742

19,56

26 184

0,130

2016

  7 347 200

5 166 336

24,69

26 110

0,125

2017

  4 013 178

2 761 268

12,70

23 815

0,110

2018

  4 810 919

3 358 058

14,87

22 047

0,098

2019

  5 582 958

3 771 451

16,09

22 568

0,096

2020

  6 343 569

4 377 938

17,99

24 068

0,099

2021

  6 472 227

4 659 909

18,45

24 997

0,099

Source: Rapport mondial 2022 sur le paludisme, OMS.

 

Les deuxième et troisième conclusions sont certainement logiques. Toutefois, il aurait peut-être fallu tenir compte – ou au moins mentionner – les effets, bien que non quantifiables, de la pandémie de COVID-19. Selon le BIG:

“En ce qui concerne les résultats programmatiques du constat 2, le BIG n’a pas jugé pertinent de relever l’effet de la pandémie pour cette question. Les observations portent sur des tendances qui datent d’avant le début de la pandémie ou n’y sont pas liées, par exemple l’analyse rétrospective aurait pu être effectuée malgré la pandémie, et les observations de 2018 auraient dû être traitées avant 2020.  En ce qui concerne le troisième constat, le BIG met en évidence des faiblesses qui n’ont pas de lien direct avec la pandémie, à savoir l’activation du système de refroidissement installé depuis des mois et qui attendait toujours d’être mis en marche, ainsi que la décision stratégique du Fonds mondial de privilégier des solutions externes”.

 

La troisième AMA mentionne la mise en place de l’UGL faisant partie d’une direction qui est en train d’être mise en place séparément en tant qu’agence de régulation.  Cela semble être une formule pour expliquer les retards; et, étant donné que le Niger est classé dans la catégorie des CID, il existe un risque que cet organisme de réglementation soit inefficace. Il est intéressant de noter que le rapport ne fait référence à aucun aspect du CID et de la PSA ayant affecté la performance du programme de lutte contre la maladie ou pris en compte dans les évaluations du BIG. Toutefois, selon le BIG:

“Le ministère de la Santé publique, de la population et des affaires sociales a réussi à transformer, par une réforme institutionnelle, la direction de la pharmacie en Agence nigérienne de régulation du secteur pharmaceutique (ANRP), conformément aux exigences régionales/sous-régionales (UEMOA, CEDEAO) et à celles de l’Union africaine. L’Agence est placée sous la tutelle technique du ministre de la Santé publique et sous la tutelle financière du Ministre des finances et gérée par un Conseil d’Administration. Le personnel de la Direction de la Pharmacie a été entièrement transféré à l’Agence. La dotation en personnel de l’UGL est en cours. La classification du Niger comme CID par le FM n’ajoute aucun risque supplémentaire à l’efficacité ou à l’inefficacité des processus”.

 

L’AMA 4 prête à confusion. Il fait référence à l’UGP du Ministère de la santé publique, de la population et des affaires sociales (abrégé de manière logique en «ministère de la Santé»), alors que cette UGP n’a jamais été mentionnée auparavant.   En effet, “Unité de gestion des subventions” est la traduction littérale en français du terme “Grant Management Unit” et l’acronyme UGS est utilisé pour faire référence à PMU (terminologie anglaise). Plus important encore, cette AMA porte sur l’établissement d’indicateurs clés de performance “en vue de contrôler l’efficacité des processus d’approvisionnement financier et non liés à la santé” qui, compte tenu des nombreuses années d’appui du Fonds mondial, auraient dû être mis en place depuis longtemps. Pourtant, selon le calendrier de l’AMA, il faudra encore un an pour définir ces ICP! Pourquoi un délai aussi long? Qui plus est, l’AMA ne consiste qu’à définir des indicateurs clés de performance, alors qu’il est nécessaire de prendre des mesures pour améliorer le taux d’absorption des subventions. L’explication du BIG concernant cette AMA et son calendrier est la suivante:

“Les ICP seront définis sur la base des travaux en cours dans le CS6, grâce à l’AT mis en place avec le soutien d’Expertise France, pour le renforcement des capacités de gestion des programmes de l’UGP, notamment la planification, la gestion et la coordination des entités chargées de la mise en œuvre et la gestion financière. Le calendrier fixé par le BIG prévoit la mise en place d’un système formel de suivi des indicateurs clés de performance, puis un délai suffisant pour s’assurer qu’il fonctionne et qu’il soutient l’objectif global d’amélioration de la performance des subventions”.

 

Enfin, dans le résumé analytique, il est indiqué que l’équipe pays n’a pas suffisamment exploité les flexibilités financières pour maximiser l’utilisation des subventions du Fonds mondial. Cependant, la seule référence à ce sujet se trouve dans le dernier paragraphe des notes du rapport qui se termine par l’affirmation suivante: “Compte tenu des situations d’insécurité connues et des conditions difficiles dans certaines régions, une exploitation plus poussée de ces flexibilités pourrait permettre d’améliorer la mise en œuvre en temps utile des activités dans certaines régions”.  Toutefois, cette affirmation ne précise pas quelles sont les flexibilités qui auraient pu ou dû être exploitées et quels montants supplémentaires elles auraient permis de dégager.

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