Le Fonds mondial accroît ses investissements en faveur des femmes et des filles
Author:
Gemma Oberth
Article Type:Article Number: 2
Un financement à effet catalyseur de 55 millions de dollars est disponible pour soutenir les programmes de lutte contre le VIH chez les adolescentes et les jeunes femmes dans 13 pays.
RÉSUMÉ En Afrique subsaharienne, environ 8 600 nouvelles infections par le VIH chez les adolescentes et les jeunes femmes sont recensées chaque semaine. La nouvelle Stratégie du Fonds mondial pour la période 2017/2022 accorde une plus grande importance à ce groupe, notamment en mesurant l'incidence du VIH parmi les femmes âgées de 15 à 24 ans comme indicateur de performance clé. Pour atteindre ses objectifs, un montant additionnel de 55 millions de dollars sera consacré à l'élargissement de la prévention du VIH parmi les adolescentes et les jeunes femmes dans le cadre du cycle de financement 2017/2019.
Pour la première fois, l’égalité de genre figure parmi les objectifs stratégiques prioritaires de la Stratégie du Fonds mondial (2017/2022). Un accent important sera mis par le Fonds mondial sur la prévention du VIH parmi les adolescentes et les jeunes femmes en Afrique sub-saharienne dans le prochain cycle de financement (2017/2019).
Les circonscriptions africaines avaient fortement poussé pour cela. Le nombre de nouveaux cas d’infection au VIH parmi les adolescentes et les jeunes femmes reste exceptionnellement élevé, en particulier dans les pays d’Afrique subsaharienne. L’ONUSIDA estime (document en anglais) qu’il y avait 450 000 nouvelles infections au VIH parmi les adolescentes et les jeunes femmes (15-24 ans) en 2015 – soit 8 600 nouvelles infections par semaine. En Afrique de l’Est et en Afrique australe – la région la plus touchée – la prévalence du VIH est de 3,3% chez les jeunes femmes (15-24 ans) contre 1,6% chez les hommes. Cette disparité est fortement liée à des facteurs sociaux et structurels, y compris l’inégalité de genre et la violence basée sur le genre.
Les nouveaux objectifs mondiaux ambitieux exigent des efforts accrus de prévention du VIH parmi les adolescentes et les jeunes femmes. La Déclaration politique des Nations Unies de 2016 sur la fin du SIDA fixe l’objectif spécifique de réduire les nouvelles infections des adolescentes et des jeunes femmes à moins de 100 000 d’ici 2020, soit une réduction de 75% par rapport à 2010.
« Nous sommes à un moment crucial pour les femmes et les filles partout dans le monde », a déclaré Heather Doyle, conseillère technique principale pour les questions de genre au Fonds mondial. « Dans ce contexte, il est impératif que nous, dans la communauté mondiale de la santé, réalisions des progrès mesurables dans notre travail pour cibler les femmes et les adolescentes ».
La stratégie du Fonds mondial est alignée sur les objectifs mondiaux. Elle comprend l’objectif de l’ONUSIDA en faveur de l’accélération (entre autres), à savoir que 90% des femmes et des filles vivront à l’abri de l’inégalité de genre et de la violence basée sur le genre, atténuant les risques et l’impact du VIH. Deux sous-objectifs spécifiques de la stratégie du Fonds mondial visent à intensifier les programmes d’aide aux femmes et aux filles et à réduire les inégalités en matière de santé, marquées par l’âge et le sexe (Diagramme 1). Réduire de 45% l’incidence du VIH parmi les adolescentes et les jeunes femmes (15-24 ans) durant le cycle de la stratégie (2017/2022) est un objectif clé de l’organisation.
Diagramme 1: Deux sous-objectifs spécifiques sur l’égalité de genre dans la stratégie 2017/2022 du Fonds mondial
Les approches spécifiques de ces deux sous-objectifs comprennent le travail avec les pays pour développer des initiatives appropriées dans le financement des demandes et des subventions pour aborder les obstacles aux services liés au genre; Et pour appuyer l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies nationales en matière de santé tenant compte des sexospécificités.
En outre, les approches consistent à lier les interventions en matière de santé génésique, maternelle, néonatale et interventions visant les adolescentes aux programmes VIH, tuberculose et paludisme; Appuyer des programmes visant à maintenir les filles à l’école; Et soutenir les programmes visant à éliminer les obstacles aux droits humains aux services, y compris les obstacles juridiques et politiques, en particulier pour les femmes vivant avec le VIH, les femmes transgenres, les femmes qui s’injectent des drogues et les travailleuses du sexe.
Bien que les sous-objectifs de la Stratégie du Fonds mondial soient nouveaux, le Fonds a historiquement privilégié les femmes et les filles, augmentant les investissements ces dernières années. Le Fonds a indiqué qu’en 2015, 55 à 60% de ses dépenses étaient destinées aux femmes et aux filles, comparativement à environ 46% en 2010. Dans plusieurs pays à forte charge, les subventions actuelles (du cycle de financement 2014/2016) dédient une part importante de leurs allocations directement aux activités de prévention du VIH parmi les adolescentes et les jeunes femmes (Tableau 1).
Tableau 1: Investissements dans des activités ciblées de prévention du VIH parmi les adolescentes et les jeunes femmes dans certains pays à forte charge, dans le cadre des subventions actuelles (cycle de financement 2014/2016)
Pays | Montant (en million de $) |
Afrique du Sud | $67.0 m |
Botswana | $6.0 m |
Cameroun | $1.8 m |
Kenya | $3.5 m |
Lesotho | $2.6 m |
Malawi | $12.0 m |
Mozambique | $4.5 m |
Namibie | $3.0 m |
Swaziland | $5.0 m |
Note: Pour le Cameroun, la programmation est toujours en discussion.
Source: Présentation du Fonds mondial lors de la réunion sur la stratégie visant à étudier l’engagement des fonds des femmes dans le cadre du travail du Fonds mondial en
faveur des adolescentes et des jeunes femmes. Nairobi, Kenya. 6-7 décembre 2016
Au Malawi, par exemple, le programme actuel du Fonds mondial vise à atteindre 80% des filles inscrites dans 322 écoles dans trois districts cibles (Mangochi, Mulanje et Lilongwe). Le bouquet d’interventions comprend: les aptitudes à la vie quotidienne et l’éducation sexuelle; les codes de bonne conduite; les Clubs de filles; les liens, systèmes et services de référence; La sensibilisation au VIH, les tests et le counselling; l’hygiène et assainissement; la construction d’actifs sociaux; les droits des femmes; l’autonomisation et la lutte contre la violence basée sur le genre. En outre, le programme vise également à atteindre 80% des filles non scolarisées dans les trois districts cibles, situés dans 20 chefferies traditionnelles. Le bouquet d’interventions pour ce groupe de filles est légèrement différent, incluant l’autonomisation économique, la distribution de préservatifs et la planification familiale, le counselling de couples et les cliniques juridiques. L’activité d’autonomisation économique comprend des programmes d’épargne et de prêts villageois, ainsi que des compétences professionnelles de base telles que la production locale de serviettes hygiéniques.
Un programme similaire est fourni au travers du soutien du Fonds mondial aux adolescentes et aux jeunes femmes dans 880 écoles du Swaziland. De plus, la subvention du Fonds mondial pour le Swazi fournit des « Kit de dignité » de protection sociale à 4 800 adolescentes âgées de 15 à 19 ans, y compris un transfert de fonds conditionnel (incitation en espèces). Pour être admissible au transfert conditionnel de fonds, les filles doivent être inscrites à l’école et assister à plus de 80% de leurs classes à chaque trimestre scolaire. De plus, pour les sous-échantillons choisis au hasard parmi les filles, des incitations sont fournies aux filles testées négatives aux deux IST curables (trichomonas vaginalis et syphilis). Selon la partie du programme dans laquelle la jeune fille se trouve, les transferts monétaires peuvent être subordonnés à l’un ou l’autre de ces critères. Une évaluation de deux ans (l’évaluation d’impact Sitakhela Likusasa) de l’efficacité de ces incitations est actuellement en cours.
Les transferts en espèces sont également pilotés dans le cadre du programme du Fonds mondial en Afrique du Sud, dans les districts à forte prévalence du VIH dans deux provinces: le Cap occidental et le KwaZulu-Natal. L’Afrique du Sud engage environ 30 000 jeunes femmes dans un programme « cash plus care », une combinaison d’incitations en espèces et de soutien social. Les transferts monétaires sont des incitations conditionnelles fondées sur les récompenses qui servent à stimuler les comportements de recherche de santé et les changements de comportement afin de minimiser le risque d’infection par le VIH. L’élément « soins » comprend le fait de relier les jeunes femmes admissibles aux services de santé appropriés et leurs familles à la protection sociale, comme les bourses d’aide sociale du gouvernement, le cas échéant. La combinaison des transferts en espèces et des composantes de soins supplémentaires s’est révélée être encore plus efficace pour réduire l’incidence du VIH que les programmes qui offrent uniquement de l’argent.
Dans un quatrième exemple, la Croix-Rouge du Kenya met aussi en œuvre un programme de transfert d’espèces pour adolescentes et jeunes femmes dans le cadre de la subvention actuelle du Fonds mondial. Le Fonds a déclaré à Aidspan que cela inclut des transferts pour environ 7 000 filles dans la baie de Homa, le comté ayant la plus forte prévalence du VIH au Kenya. La baie de Homa représente environ 10% de toutes les infections VIH dans le pays.
Dans une interview récente, Heather Doyle a déclaré à Aidspan que l’approche du Fonds mondial pour soutenir les transferts en espèces en tant qu’intervention de prévention du VIH pour les adolescentes et les jeunes femmes est concentrée uniquement dans les zones à forte charge et est adaptée au contexte épidémiologique et social spécifique. Mme Doyle a déclaré que la compréhension des contextes sociaux est essentielle, précisant que « les transferts de fonds, comme toute intervention en faveur des adolescentes et des jeunes femmes, doivent s’insérer dans un ensemble bien pensé et complet de services qui correspond à la réalité de ce que vivent les adolescentes et les jeunes femmes. »
Outre leur spécificité géographique, le soutien apporté par le Fonds mondial à des interventions telles que les transferts d’espèces au Kenya, en Afrique du Sud et au Swaziland est également ciblé stratégiquement en fonction des modes d’infection liés à l’âge. Selon l’ONUSIDA (en anglais), en Afrique du Sud, au Kenya, et au Swaziland, on estime qu’un grand nombre de nouvelles infections au VIH se produisent chez les adolescentes de 15 à 19 ans, alors que dans d’autres pays africains (comme le Nigeria, l’Ouganda et le Zimbabwe) ces infections sont plus communes chez les femmes ayant un peu moins de trente ans. L’ONUSIDA recommande (en anglais) des transferts en espèces comme intervention pour les adolescentes et les jeunes femmes âgées de 10 à 24 ans dans les pays hyper-endémiques où les taux d’inscription dans les écoles secondaires sont faibles.
Pour le prochain cycle de financement (2017/2019), le Fonds mondial intensifie ses investissements en faveur des adolescentes et des jeunes femmes. Les pays éligibles peuvent accéder à un montant additionnel de 55 millions de dollars en plus des allocations pays pour faire face au VIH parmi les adolescentes et les jeunes femmes (tableau 2) dans le cadre des fonds de contrepartie inclus dans les investissements à effet catalyseur. Pour obtenir les fonds de contrepartie, un pays doit augmenter – par rapport à sa précédente subvention du Fonds mondial – son montant d’allocation dédié aux adolescentes et aux jeunes femmes, ainsi que ses objectifs de programme pour ce groupe (pour plus d’informations sur le fonctionnement des fonds de contrepartie, lire l‘article de l’OFM).
Tableau 2: Fonds de contrepartie disponibles pour lutter contre le VIH chez les adolescentes et les jeunes filles (cycle de financement 2017/2019)
Pays | Montant (en million de $) |
Afrique du Sud | $5.0 m |
Botswana | $1.0 m |
Cameroun | $1.9 m |
Kenya | $5.0 m |
Lesotho | $1.5 m |
Malawi | $7.0 m |
Mozambique | $6.0 m |
Namibia | $1.0 m |
Ouganda | $5.0 m |
Swaziland | $1.5 m |
Tanzania | $8.0 m |
Zambia | $4.0 m |
Zimbabwe | $8.0 m |
Note: Le montant indiqué pour le Cameroun a été converti en euros (1 782 200 €)
Source: site Web du Fonds mondial – http://www.theglobalfund.org/fr/fundingmodel/process/catalytic-investment/
Pour certains pays, pour accéder au montant total des fonds de contrepartie disponibles, il faudra intensifier significativement les programmes et les cibles en faveur des adolescentes et des jeunes femmes. Au Mozambique, par exemple, le pays consacre actuellement environ 4,5 millions de dollars de son allocation du Fonds mondial à des programmes de lutte contre le VIH pour les adolescentes et les jeunes femmes (tableau 1). Pour accéder aux fonds de contrepartie de 6 millions de dollars, le pays devra augmenter son budget actuel d’environ un tiers (au moins 6 millions de dollars) et augmenter ses objectifs actuels à près des deux tiers (correspondant à au moins 12 millions de dollars en investissements ) pour cette population.
« Pour les pays d’Afrique subsaharienne où le fardeau est disproportionné, le Fonds mondial s’efforce d’assurer l’ampleur et la qualité des programmes », a déclaré Mme Doyle. « La compréhension des obstacles liés au genre est cruciale en tant que stratégie d’investissement stratégique. » Comme plusieurs des 13 pays du tableau 2 déposent des demandes de financement au premier semestre de l’année 2017, Aidspan continuera à surveiller la priorité accordée à ces programmes.
Note de la rédaction: Cet article, publié à l’origine le 28 janvier dans la version anglaise de l’OFM, a été mis à jour le 7 février pour corriger quelques erreurs. Les montants du tableau 1 pour le Kenya et le Mozambique ont été modifiés. Le nouveau montant pour le Mozambique a nécessité, à son tour, quelques ajustements au texte du paragraphe immédiatement après le tableau 2.