LE CONSEIL D’ADMINISTRATION « RELANCE LA PROCÉDURE » DE RECRUTEMENT DU NOUVEAU DIRECTEUR EXÉCUTIF
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Les membres du Conseil d’administration ont choisi de ne considérer aucun des deux candidats présélectionnés
RÉSUMÉ Évoquant leurs préoccupations quant à la procédure de recrutement et non la qualité ou l’aptitude des candidats, le Conseil d’administration du Fonds mondial a décidé de continuer à chercher un nouveau Directeur exécutif.
Faisant état de préoccupations concernant la procédure, le Conseil d’administration du Fonds mondial a décidé de continuer à chercher un nouveau Directeur exécutif*.
La décision a été prise le 27 février lors de la réunion du Conseil à Genève, en Suisse. « En raison de problèmes qui se sont posés lors de la procédure de recrutement, les membres du Conseil d’administration ont estimé ne pas être en mesure de prendre une décision », a déclaré le Fonds mondial dans un bref communiqué de presse. « Tout en faisant part de son soutien total pour le travail accompli par le Comité des candidatures, le Conseil d’administration a décidé de relancer la procédure. »
Jusqu’à une date récente, le Fonds mondial devait faire un choix parmi les candidats qui avaient été présélectionnés par le Comité des candidatures au poste de Directeur exécutif. Au moment de la réunion du Conseil, les deux personnes suivantes étaient retenues comme candidats :
- Dr Muhammad Ali Pate, chercheur invité à l’École Chan de santé publique de Harvard, ancien spécialiste de la santé de la Banque mondiale et ancien ministre de la Santé du Nigeria; et
- Subhanu Saxena, un dirigeant d’entreprise pharmaceutique qui, en août 2016, a démissionné de son poste de Directeur général de Cipla, une importante société pharmaceutique indienne.
Cependant, dans les jours précédant la réunion du Conseil d’administration, les préoccupations au sujet du processus ont commencé à prendre le devant de la scène. Au final, selon les informations d’Aidspan, les deux candidats n’ont même pas été interviewés par l’ensemble du Conseil d’administration.
Le Comité des candidatures avait également inscrit une troisième candidate – Helen Clark, administratrice du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et ancienne première ministre de Nouvelle-Zélande -, mais elle a abandonné la course bien avant la réunion du Conseil d’administration.
Le Comité des candidatures était présidée par Jan Paehler, vice-président du Comité d’éthique et de gouvernance du Conseil d’administration, et comprenait Amy Baker, Michèle Boccoz, Sarah Boulton, Hristijan Jankuloski, Vinand Nantulya et Filipe da Costa de diverses délégations du Conseil; Et deux membres indépendants, Eric Goosby et Mphu Ramatlapeng.
« Le Conseil d’administration est résolu à suivre une procédure qui respecte les normes les plus strictes possibles, qui soit équitable, transparente et fondée sur le mérite, et qui soit menée dans des délais raisonnables et avec professionnalisme », a déclaré Norbert Hauser, président du Conseil d’administration.
« La première des priorités du Conseil d’administration est de trouver un nouveau Directeur exécutif dont le leadership sera une source d’inspiration et qui pourra mettre en œuvre une nouvelle stratégie ambitieuse pour en finir avec les épidémies de sida, de tuberculose et de paludisme », a déclaré le communiqué. Elle ajoute que de plus amples renseignements seront fournis dès que possible.
Événements qui ont mené à cette décision
Les dernières semaines ont été tumultueuses.
Comme nous l’avons signalé dans le dernier numéro de la version anglaise de l’OFM, le 13 février dernier, le rapport final du Comité des candidatures a été envoyé aux membres du Conseil d’administration et aux suppléants via un portail sécurisé. Le rapport contenait les noms des finalistes pour le poste (c.-à-d. la liste restreinte) ainsi que la justification de leur sélection. Le Comité des candidatures avait été mandaté pour fournir jusqu’à quatre noms. Il a été demandé aux membres du Conseil et aux suppléants de garder la liste strictement confidentielle.
Cependant, comme cela semblait inévitable, les noms des candidats finaux ont fuité. Les e-mails volaient dans toutes les directions, mais la première personne à sortir l’information a été Donald McNeil du New York Times. M. McNeil a révélé qu’il y avait trois candidats sur la liste et il les a identifiés comme étant Dr Pate, M. Saxena et Mme Clark.
- McNeil a écrit que quiconque serait sélectionné ferait probablement l’objet d’un examen rigoureux de la part des États-Unis, le plus grand bailleur du Fonds. « Bien que tous auraient pu être considérés comme d’excellents candidats pour ce poste il y a encore quelques temps, les responsables de la santé mondiale sont inquiets que leurs antécédents poussent l’administration Trump à s’éloigner des engagements historiques des États-Unis envers le Fonds ».
(Les États-Unis ont toujours donné un tiers du budget du Fonds mondial et sont, de loin, la principale source de financement.)
- McNeil a déclaré que le Dr Pate avait utilisé Twitter pour appeler M. Trump un fasciste, disant qu’il avait beaucoup en commun avec l’Etat islamique en raison de sa position anti-musulmans. (Plus tard dans le même article, McNeil expliquait que Dr Pate n’avait pas directement tenu ces propos au sujet de M. Trump mais qu’il avait re-tweeté des tweets d’autres personnes qui les avaient écrits.)
En ce qui concerne M. Saxena, M. McNeil a écrit que « les fonctionnaires américains peuvent regarder avec méfiance l’embauche d’un cadre d’une grande société pharmaceutique dont le Fonds mondial a été un client important. En 2015, six millions d’Africains recevaient des antirétroviraux fabriqués par Cipla. »
Au sujet de Mme Clark, M. McNeil a déclaré que « l’administration Trump a exprimé son hostilité envers les programmes des Nations Unies ». Il a ajouté que l’administration a envisagé de réduire son soutien aux opérations internationales des États-Unis d’au moins 40%.
- McNeil a cité Seth Faison, Directeur des communications du Fonds mondial, déclarant qu’aucun candidat ne devrait se retirer.
« Beaucoup de gens qui travaillent maintenant avec M. Trump ont dit des choses à son sujet pendant la campagne », a-t-il déclaré au sujet du Dr Pate.
Au sujet de M. Saxena et de Mme Clark, M. Faison a déclaré que les connexions avec les États-Unis ou les milieux d’affaires étaient inévitables pour pratiquement tous les candidats qui ne provenaient pas d’un grand pays donateur. Le Directeur exécutif ne supervise pas les achats des compagnies pharmaceutiques, a-t-il précisé, et le Fonds mondial donne de l’argent à de nombreux récipiendaires, dont 300 millions de dollars au PNUD et 800 millions au Nigeria.
« Quiconque a déjà travaillé dans un gouvernement qui a obtenu des fonds du Fonds mondial ne remplirait pas ces critères, ce qui n’est pas réaliste », a déclaré M. Faison. Un Directeur pourrait se récuser pour des décisions présentant de potentiels conflits d’intérêts, a ajouté M. Faison, et un autre représentant du Fonds pourrait se rapprocher des États-Unis lors de la prochaine campagne d’appel aux dons.
Selon les informations d’Aidspan, le 14 février, dans une lettre adressée à Norbert Hauser, le président du Conseil d’administration, Mme Clark s’est retirée de la course. Dans cette lettre non rendue publique, elle a critiqué le processus de sélection. Peu de temps après, Jan Paehler, président du Comité des candidatures, a envoyé une lettre au Conseil d’administration réfutant les critiques de Mme Clark concernant le processus de sélection.
Le 17 février, un article de Firstpost (en anglais) a révélé que les trois finalistes avaient été classés dans l’ordre suivant par le Comité des candidatures : Dr Pate, M. Saxena et Mme Clark.
Avant les délibérations du Conseil d’administration réuni en plénière, les deux finalistes ont été interviewés par téléconférence par des représentants des trois circonscriptions de la société civile du Conseil – le Dr Pate le 20 février, et M. Saxena le 24 février.
Réactions
La réaction des gens à ce qui s’est passé a clairement montré qu’ils étaient préoccupés par l’aptitude des candidats ainsi que le processus de sélection. Bien que personne n’ait parlé publiquement, la publication des noms figurant sur la liste finale a engendré une grande consternation parmi bon nombre de circonscriptions du Fonds mondial.
Certaines des préoccupations ont fait écho à ce que Donald McNeil a rapporté dans le New York Times – c’est-à-dire qu’au moins deux des candidats sur la liste – Muhammed Pate et Subhanu Saxena – pourraient contrarier les fonctionnaires des États-Unis. (Une fois que Mme Helen Clark s’est retirée, c’étaient les seuls candidats restant.)
En ce qui concerne M. Pate, les gens se demandent comment le Comité des candidatures a pu sérieusement envisagé quelqu’un qui avait attaqué publiquement le président Trump. En outre, certaines personnes ont souligné qu’en mai 2013, le Parlement nigérian a adopté, pendant le mandat de M. Pate au gouvernement, une loi anti-gay très répressive. Selon eux, M. Pate ne s’est pas prononcé contre cette loi, ni à ce moment-là ni après avoir quitté le gouvernement. D’autres ont prétendu que M. Pate n’avait jamais démontré d’efforts de plaidoyer ou de soutien en faveur des droits LGBT ou d’autres questions clés relatives aux droits humains.
En ce qui concerne M. Saxena, certaines personnes ont déclaré que son mandat récent en tant que PDG de Cipla soulevait des questions quant à son aptitude à occuper le poste de Directeur exécutif du Fonds mondial. Elles ont également souligné que M. Saxena ne pouvait pas clairement démontrer de travail de plaidoyer en faveur des droits humains et des questions de genre.
Dans un article (en anglais) paru le 24 février dans Devex, une plateforme en ligne pour les professionnels du développement, Michael Igoe a déclaré que Devex avait parlé à plusieurs « leaders bien placés de la santé et du développement mondial » et que « chacun exprimait des sentiments mitigés et une certaine déception que le processus de sélection n’ait pas généré de candidats connus pour leur leadership visionnaire en matière de santé mondiale ».
Dans un article paru dans Science le 27 février, Jon Cohen a déclaré que le Dr Pate lui avait affirmé dans un courriel qu’il n’avait pas l’intention de présenter une nouvelle candidature pour le poste. Le Dr Pate a qualifié la décision du Conseil d’administration d’« injuste et injustifiée ». Le Dr Pate a ensuite tweeté: « Je pense que le Conseil d’administration du @GlobalFund devrait démissionner pour incompétence ».
Pour finir et pour mettre la décision du Conseil d’administration en perspective, tous les candidats au poste de Directeur exécutif du Fonds mondial, ont fait l’objet d’objections, y compris Mark Dybul, le titulaire actuel.
*le genre masculin est utilisé en référence à ce poste afin de faciliter la lecture de cet article mais ne se veut aucunement discriminatoire