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Le Fonds mondial suspend son partenariat avec Heineken
OFM Edition 65

Le Fonds mondial suspend son partenariat avec Heineken

Author:

David Garmaise

Article Type:
NOUVELLES

Article Number: 2

Le Fonds mondial Ć©voque des inquiĆ©tudes sur l’utilisation d’hĆ“tesses par Heineken pour faire la promotion de la biĆØre

RƉSUMƉ Des semaines durant, le Fonds mondial a Ć©tĆ© critiquĆ© pour le partenariat conclu avec Heineken, en raison des prĆ©occupations quant aux effets de l’alcool sur la santĆ©. Maintenant, le Fonds mondial a suspendu le partenariat – mais, dit-il, pour des motifs Ć©trangers aux critiques, Ć  savoir ses inquiĆ©tudes concernant l’utilisation d’hĆ“tesses par Heineken pour faire la promotion de la biĆØre, de maniĆØres les exposant Ć  l’exploitation sexuelle et Ć  des risques pour leur santĆ©. Le Directeur exĆ©cutif, Peter Sands, a annoncĆ© la dĆ©cision dans un message adressĆ© au Conseil d’administration et une dĆ©claration publiĆ©e sur le site web du Fonds mondial.

Le Fonds mondial est revenu sur sa dĆ©cision concernant son partenariat avec Heineken – mais pas pour les raisons que l’on pourrait croire, semble-t-il.

Le 29Ā mars, le Fonds mondial a indiquĆ© dans une brĆØve annonce qu’il suspendait le partenariat conclu avec Heineken « en raison d’informations rĆ©centes faisant Ć©tat de l’utilisation d’hĆ“tesses par la sociĆ©tĆ© pour faire la promotion de la biĆØre de maniĆØres les exposant Ć  l’exploitation sexuelle et Ć  des risques pour leur santé ».

Le 23Ā mars, un journaliste nĆ©erlandais du nom d’Olivier van Beemen a publiĆ© un article sur le site web du quotidien NRC, dans lequel il dĆ©clare que Heineken fait appel Ć  des « hĆ“tessesĀ Ā» pour promouvoir la vente de biĆØre dans 10Ā pays africains, et que ces femmes sont souvent confrontĆ©es Ć  des « intimitĆ©s importunes, Ć  des abus ou Ć  la prostitution pendant le travailĀ Ā».

« Bien que nous ne connaissions pas tous les dĆ©tailsĀ Ā», a indiquĆ© le Directeur exĆ©cutif du Fonds mondial dans un message au Conseil d’administration, « il est Ć©vident que la pratique consistant Ć  faire appel Ć  des « hĆ“tessesĀ Ā» est courante dans l’industrie de la biĆØre. En 2018, ce n’est tout simplement pas acceptable – et Ƨa n’aurait du reste jamais dĆ» l’êtreĀ Ā».

Heineken
Illustration par Roland Blokhuizen, IOGT
International

C’est pourquoi, a indiquĆ© M. Sands, « j’ai dĆ©cidĆ© que nous devons suspendre le partenariat du Fonds mondial avec Heineken jusqu’à ce que Heineken dĆ©montre ĆŖtre prĆŖt Ć  prendre des mesures dĆ©cisives face Ć  cette situation. Adopter cette position maintenant nous permet de prendre les devants en rĆ©ponse aux inĆ©vitables questions sur ce que nous faisons face aux allĆ©gations. Cela pourrait Ć©galement inciter Heineken Ć  donner l’exemple au reste de l’industrie en apportant des changements positifs – ce qui serait une bonne chose en soi et pourrait nous permettre de reprendre le partenariatĀ Ā».

M. Van Beemen, qui vient de publier un livre sur le recours aux hĆ“tesses par Heineken, avance que l’entreprise est au courant du problĆØme depuis des annĆ©es, mais n’a pas fait grand-chose pour y mettre fin. En 2007, assure-t-il, une vaste Ć©tude interne a rĆ©vĆ©lĆ© que Heineken dĆ©ployait quelques 15Ā 000Ā hĆ“tesses dans une centaine de pays. Dans 70Ā marchĆ©s, le recours Ć  ces hĆ“tesses Ć©tait qualifiĆ© de risquĆ© en raison d’abus sexuels, de sous-rĆ©munĆ©ration, de consommation obligatoire d’alcool ou d’uniformes provocateurs.

InvitĆ©e Ć  commenter l’affaire, Heineken a rĆ©pondu Ć  M. van Beemen que « les pratiques dĆ©crites sont en complĆØte contradiction avec les principes que nous dĆ©fendons et nous condamnons fermement ces abusĀ Ā». Selon Heineken, « ce sujet mĆ©rite une plus grande attention en Afrique que celle que nous et d’autres parties prenantes y avons prĆŖtĆ© ces derniĆØres annĆ©es. C’est pourquoi, nos sociĆ©tĆ©s d’exploitation locales, les agences promotionnelles, les autres parties prenantes concernĆ©es et nous prenons des mesures supplĆ©mentaires en rĆ©ponse Ć  ces abus et pour Ć©viter qu’ils se reproduisent Ć  l’avenirĀ Ā».

Le Fonds mondial et Heineken avaient annoncĆ© en janvier 2018 un partenariat dans le cadre de la lutte contre les maladies infectieuses. Le Fonds mondial s’est vu critiquĆ© par divers dĆ©fenseurs de la santĆ© publique et autres observateurs pour son association avec un produit dont ils disent qu’il peut nuire Ć  la santĆ©. (Voir ici et ici.)

 

RƩactions

Comme le Fonds mondial devait s’y attendre, les militants et observateurs ont rapidement conclu qu’il cherchait un prĆ©texte pour mettre fin au partenariat.

« Cette annonce est une bonne nouvelle pour la santĆ© mondiale et le dĆ©veloppement. Il ne fait aucun doute que le Fonds mondial a besoin d’une raison de mettre fin Ć  ce partenariat peu judicieux, et l’actualitĆ© lui a donnĆ© une occasion de sauver la faceĀ Ā», a dĆ©clarĆ© Kristina Sperkova, PrĆ©sidente internationale d’IOGT International dans un blog sur le site web de l’organisation. (IOGT Ć©tait une des trois ONG qui avaient envoyĆ© une lettre ouverte au Fonds mondial au dĆ©but de l’annĆ©e en protestation contre le partenariat.)

Mais « suspendre n’est pas la mĆŖme chose que rĆ©silierĀ Ā», a ajoutĆ© Mme Sperkova. « Toute cette affaire expose aussi le fait que le Fonds mondial a manquĆ© Ć  son devoir de mener une analyse approfondie avant de conclure un partenariat avec un gĆ©ant de l’industrie des boissons alcoolisĆ©esĀ Ā».

« L’incapacitĆ© du Fonds mondial Ć  percevoir le conflit d’intĆ©rĆŖts fondamental entre sa mission essentielle et un partenariat avec l’industrie de l’alcoolĀ Ā», estime Mme Sperkova, « doit soulever des doutes sĆ©rieux sur son engagement Ć  mener des actions fondĆ©es sur des donnĆ©es probantes pour mettre fin au sida, Ć  la tuberculose et au paludismeĀ Ā».

Ils ont été nombreux à donner leur avis dans la twittosphère ; en voici quelques exemples :

La prise de distance du Fonds mondial semble trĆØs limitĆ©e. Sa dĆ©claration laisse entendre que si le brasseur n’avait pas de publicitĆ© sexiste, le partenariat pourrait reprendre. Ce n’est tout simplement pas suffisant.

Helen Clark est ancienne Première ministre de Nouvelle-Zélande et, plus récemment, ancienne Administratrice du PNUD.

Le Fonds mondial a suspendu son partenariat avec Heineken. Une occasion cruciale de totalement repenser et rĆ©silier un partenariat avec une sociĆ©tĆ© dont les produits ont d’importants effets nuisibles sur le plan social et de la santĆ©, notamment parce qu’ils constituent un facteur de risque vis-Ć -vis des maladies non transmissibles, du sida et de la tuberculose.

L’Alliance sur les maladies non transmissibles (NCD Alliance) est l’une des deux autres ONG signataires de la lettre ouverte au Fonds mondial.

Premier pas positif de la part du Fonds mondial, qui a suspendu son partenariat avec Heineken. En voici quatre autresĀ : reconnaĆ®tre l’incohĆ©rence du partenariat en termes de santĆ© publique et de maladies non transmissiblesĀ ; rĆ©silier le partenariat, pas seulement le suspendreĀ ; revoir la politique du Fonds mondial en matiĆØre de partenariatsĀ ; lancer un dialogue au sein des Nations Unies sur les partenariats incompatibles avec les objectifs de dĆ©veloppement durable.

Katie Dain est Directrice gĆ©nĆ©rale de l’Alliance sur les maladies non transmissibles.

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